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  • Roch WAMYTAN
  • Homme politique, membre de l'Union Calédonienne et du FLNKS, Signataire de l'accord de Nouméa en 1998, Président du groupe UC-FLNKS et Nationalistes au Congrès de la Nouvelle-Calédonie
  • Homme politique, membre de l'Union Calédonienne et du FLNKS, Signataire de l'accord de Nouméa en 1998, Président du groupe UC-FLNKS et Nationalistes au Congrès de la Nouvelle-Calédonie

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Citoyenneté calédonienne socle du destin commun
Présentation d'une loi de pays proposant le drapeau du FLNKS comme drapeau du Pays                   
   
Bilan des déplacements dans la région du président du Congrès (coopération interparlementaire)         
       

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8 novembre 2016 2 08 /11 /novembre /2016 09:17

Roch WAMYTAN, président du groupe UC FLNKS et Nationalistes

Madame la Ministre des Outremer,

Messieurs les représentants du président de la République,

Mesdames et messieurs,

Monsieur le Premier ministre,

       Je voudrais tout d’abord vous remercier pour la teneur de votre discours d’ouverture de ce Comité des signataires qui revêt, pour notre groupe, une importance particulière car c’est l’occasion de lever toutes les hypothèques qui risquent d’entraver le bon déroulement de la consultation sur l’accession du pays à la pleine souveraineté, aboutissement du processus de décolonisation de l’Accord de Nouméa de 1998, débuté avec la déclaration de Nainville-les-Roches en 1983 et les Accords de Matignon-Oudinot en 1988.

            Ce Comité des signataires est également le dernier avant les élections présidentielles et législatives françaises de 2017, il est aussi l’occasion de relever quelques remarques significatives sur l’action politique des gouvernements socialistes dans notre pays. Depuis l’élection du président François Mitterrand en  mai 1981, à mai 2017, les aléas de la vie institutionnelle française auront conduit le parti socialiste et ses alliés à gérer les affaires calédoniennes une vingtaine d’années sur les 36 ans qui vont nous séparer de la promesse faite par le candidat François Mitterrand à nos ainés de l’époque, celle de voir un jour notre pays accéder à l’indépendance.

         C’est avec cette double préoccupation en tête, la promesse de 1981 et les accords avec les dispositifs d’accompagnement mis en place que nous souhaitons vous faire connaître nos positions sur les points de l’ordre du jour. Promesse et accords, deux expressions d’une parole de vie partagée. Vous nous connaissez bien désormais Mr le premier ministre pour savoir l’importance que notre vieille civilisation mélanésienne millénaire attache à la Parole. Vous savez aussi qu’un manquement à la parole donnée peut être source de conflit par la rupture des liens de confiance pouvant conduire à la destruction, car telle est la destinée de la Parole partagé, elle est source de vie mais elle peut aussi causer la mort en cas de défaillance volontaire et calculée de l’une des parties. L’histoire de nos relations de ces trois dernières décennies reste émaillée de ces ruptures à répétition. Mais à chaque fois, nous, hommes de consensus issus de cette terre océanienne, avons toujours choisi de rebondir pour préférer la vie à la mort.

Mr le premier ministre

Sur l’avenir institutionnel

Concernant l’avenir institutionnel, nous avons pris connaissance du Rapport de la mission d’étude et de conseil sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie. Nous considérons simplement ce rapport comme une contribution supplémentaire au débat sur l’évolution institutionnelle de notre Pays, élaboré à partir d’une méthode proposée par l’Etat. Néanmoins, il nous paraît primordial qu’il soit complété par le travail d’experts internationaux, spécialistes des questions relatives aux compétences régaliennes. Cette demande a déjà été effectuée par notre groupe à de multiples occasions, notamment durant les comités de pilotage et nous souhaitons que l’Etat prenne des mesures concrètes pour y répondre. Nous avons d’ores et déjà transmis des noms d’experts acceptant la tâche de soumettre leurs analyses.

Par ailleurs, l’Union Calédonienne a souhaité apporter sa contribution en élaborant un document résumant sa vision de la future Nation. A l’occasion de ce Comité des signataires, la délégation de l’Union Calédonienne a ainsi communiqué son document « Après 2018, notre vision de la Nation » lors de ses rencontres bilatérales. Il n’est pas exclu, que les autres partis politiques représentés au sein du groupe que je préside au congrés de la Nouvelle Calédonie aient aussi la possibilité d’en faire autant dans les prochains mois.

Monsieur le premier ministre,

 

Sur la liste électorale spéciale de consultation

S’agissant de la liste électorale spéciale de consultation, la composition de cette liste est pour nous déterminante car elle est au cœur même de cette Parole de vie partagée que je citais précédemment : l’engagement à nous permettre d’exercer  notre droit à l’autodétermination dans les meilleurs conditions possibles à l’instar de tout peuple ayant été colonisé à un moment de son histoire. Notre participation à la consultation référendaire de 2018 sera examinée à l’aune du respect  de cette parole donnée. Et ce d’autant plus que nous avons su, avec générosité, partager notre droit  à l’autodétermination avec ceux qui ont fait de la Nouvelle Calédonie, leur pays au même titre que nous.

L’Accord de Nouméa étant avant toute chose un processus de décolonisation, nous considérons que l’ensemble des Kanak, seul peuple colonisé, doit pouvoir participer à une consultation issue d’une demande historique de sa part, et expression, par le vote, de son droit à l’autodétermination et à l’indépendance, résultat logique de la prise de possession de la Nouvelle-Calédonie par la France dans un monde ayant évolué depuis vers le droit à la liberté et à la libre disposition des peuples.

Par conséquent, nous demandons que tous les Kanak soient automatiquement inscrits sur la liste électorale spéciale de consultation, une demande qui trouve toute sa justification dans le point 2 de la Résolution 1514 de l'Assemblée générale des Nations Unies du 14 décembre 1960, « Tous les peuples ont le droit de libre détermination ; en vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et poursuivent librement leur développement économique, social et culturel ».

Monsieur le premier ministre

Sur le nickel

         Concernant le rapport de Mr Michel Colin et afin d’avancer plus sûrement dans la définition d’une stratégie industrielle, l’Union Calédonienne souhaite que la méthode soit redéfinie avec la constitution d’un groupe de travail composé de représentants des groupes politiques du congrès, disposant de la possibilité de valider des objectifs intermédiaires et opérationnels : développement d’une diplomatie dans le secteur nickel, restructuration et renforcement des outils de gestion du Pays dans le secteur (Dimenc…).

Sur la situation de l’usine du Nord

Par ailleurs, il est indéniable que ce Comité des signataires puisse exprimer une position sur la situation de l’usine du Nord. Après des décennies de promesses non tenues, la forte mobilisation des indépendantistes a permis d’enclencher, enfin, une vraie démarche de rééquilibrage en permettant la construction de l’usine de KNS. Aujourd’hui, du fait d’un contexte économique et financier exceptionnellement difficile, cette réalisation est en danger malgré une intervention financière importante de la province Nord. L’annonce du licenciement d’employés locaux en est la conséquence récente, à nos yeux, il s’agit là d’une conséquence absolument inacceptable.

Ce grand chantier a suscité d’immenses espoirs qui ne peuvent être déçus car la bonne évolution du Pays est en jeu. Il est de la responsabilité de l’ensemble des actionnaires de KNS, de la classe politique calédonienne et de l’Etat de réunir toutes les conditions pour aider l’opérateur à passer ce cap difficile. A cet effet, l’Union Calédonienne demande que l’Etat intervienne pour aider la province Nord à faire face aux difficultés de sa SEM et pour lui permettre de retrouver un nouveau souffle lorsque le contexte économique international se rétablira.

Monsieur le premier ministre,

Sur les contrats de développement

Sur la question des contrats de développement, et conformément à l’article 211 de la Loi organique, la prochaine génération de ces contrats de développement 2017-2021 a été élaborée à partir d’un dialogue entre l’Etat et les collectivités calédoniennes. Mais ce qui diffère de la génération précédente, c’est l’adoption récente par le congrès du schéma d’aménagement et de développement de la Nouvelle-Calédonie NC2025 et il importe désormais que, selon les dispositions de l’article 211, les prochains contrats de développement soient pleinement compatibles avec ledit schéma et que nous puissions définir dans ce cadre, ensemble, les secteurs à privilégier.

Il importe aussi que la nouvelle génération de ces contrats, dispositif prévu pour accélérer le développement et le rééquilibrage, fasse l’objet, du fait des agendas budgétaires, d’une signature à la mi-novembre et d’inscriptions budgétaires dans la Loi de finances 2017, afin de pouvoir porter leurs effets au plus tôt, du fait que nous sommes dans la dernière phase de l’Accord de Nouméa.

Notre délégation sollicite par ailleurs toute votre attention pour que ce 15ième comité des signataires prenne en considération les demandes que le président du sénat coutumier formulera tout à l’heure pour que le financement des politiques publiques relatif à l’identité kanak soit prise en compte dans cette nouvelle génération des contrats 2017-2021. Ces demandes relevant de la charte des valeurs kanak, du plan Marshall ou des ZODEP (zone de développement prioritaire) pourraient faire l’objet d’un financement dédié ou intégrées dans les propositions des institutions calédoniennes.

 

Les transferts prévus à l’article 27 de la Loi organique

Par ailleurs, nous réaffirmons notre position maintes fois exprimés, qu’ il ne fait aucun doute que les transferts prévus à l’article 27 n’ont rien d’optionnel et que leur mise en œuvre relève de la seule responsabilité de l’Etat.

Monsieur le Premier ministre,

Sur la problématique de progression de la délinquance

Avant de clore mon propos je voudrais, dans la suite logique de la réunion d’avant hier au ministère de l’intérieur, rapidement esquisser la problématique de progression de la délinquance juvénile dans notre pays. Comme je l’ai exprimé de nombreuse fois au congrès, nous souhaitons que le sujet de la sécurité ne fasse pas l’objet d’une exploitation politicienne, au gré des échéances électorales, et soit traité au niveau de ce qu’il est : un problème de société, qui résulte en partie des déséquilibres engendrés par le système colonial.

Il nous paraît essentiel de cerner au préalable les causes profondes de cette problématique afin de définir les moyens les plus adaptés au contexte local pour solutionner durablement ce phénomène. Il nous semble en effet évident que se précipiter sur des mesures répressives ne résoudra rien sur le long terme. Bien au contraire cela risque de nous entrainer dans une spirale infernale risquant d’aboutir à de nouveaux drames humains tels que celui que  le pays vient de connaitre le 29 octobre dernier avec la mort du jeune William DECOIRE, les six gendarmes blessés, les milliers de personnes empêchées de rejoindre leurs domiciles, sans compter  les millions de dégâts causés aux collectivités ou aux biens privés. La construction du destin commun doit être préservée, en toute priorité, elle ne peut pas se fracasser et  éclater en mille morceaux contre une problématique dont on n’aura mal évalué ensemble la façon la plus intelligente et la plus sage de la traiter.

Aussi, nous réitérons notre demande d’un débat sur le sujet au congrès de la Nouvelle-Calédonie et faisons la proposition d’un groupe de travail pluridisciplinaire auquel participeraient des coutumiers et des experts, ou universitaires, spécialistes des questions culturelles, sociales et éducatives.

Pour finir, nous demandons que la réunion technique qui se tient traditionnellement le lendemain du comité soit reportée pour se tenir à Nouméa avant la fin de cette année. En effet, vous n’êtes pas sans savoir que les congrès de nos mouvements se déroulent toujours à la mi-novembre, des moments importants qui exigent que la plupart de nos représentants reprennent l’avion juste après la clôture du comité.

Monsieur le Premier ministre,

En guise de conclusion de mes propos, je dirai que l’année 2017 sera pour nous indépendantistes, l’année d’une vigilance extrême, du fait des deux grandes élections nationales que sont les présidentielles et les législatives. Car on peut légitimement se poser la question du dossier de l’avenir de la Nouvelle Calédonie dans la campagne des divers partis politiques français plus divisés que jamais aussi bien à droite qu’à gauche avec en toile de fond, la montée croissante du front national surfant sur ces divisions. Le dossier Calédonien ne risque-t-il pas d’être instrumentalisé par les partis en course  comme dans les années 1980 et notamment en 1988 à Ouvéa ?

2018, année de tous les dangers lorsque nous observons les incertitudes qui pèsent sur l’organisation de la consultation référendaire et son déroulement. Ou encore lorsque nous observons les options qui nous sont présentées pour nous mener vers un 3ième accord ou une fausse indépendance de type françafrique.

         L’histoire nous pousse à une constante vigilance dans les stratégies politiques mises en œuvre. L’histoire des décolonisations, de même que notre histoire commune avec la France depuis 163 ans nous ont appris que nous aurons à chaque fois à nous battre et parfois à négocier avec une puissance coloniale, en même temps puissance mondiale dont l’intérêt supérieur de la nation tentera toujours d’avoir le dernier mot sur le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes par l’application du principe d’une ligne rouge de l’indépendance à ne pas franchir. Mais les stratégies qui en découlent impactent violemment la cohésion du peuple kanak participant ainsi à sa lente implosion dont la dérive d’une partie de sa jeunesse est le signe visible d’un mal être profond.

Au nom de ma délégation, je vous remercie Monsieur le Premier ministre pour votre implication constante dans le dossier calédonien depuis votre prise de fonction et comme il s’agit de notre dernière rencontre dans ce format comité des signataires, je vous souhaite bonne chance pour les élections nationales de 2017.

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7 juin 2016 2 07 /06 /juin /2016 20:06
 La colonisation en Nouvelle-Calédonie: un dossier politiquement clos?

PACIFIC REGIONAL SEMINAR OF THE SPECIAL COMMITTEE OF 24

“Implementation of the Third International Decade for the Eradication of Colonialism: commitments and actions for decolonization in the Non-Self-Governing Territories”

Managua, Nicaragua 31 May to 2 June 2016

M. Roch Wamytan
President of the UC-FLNKS and Nationalists Group
at the Congress of New Caledonia

Monsieur le Président du Comité spécial de décolonisation,

Mesdames et Messieurs les membres du Comité spécial de décolonisation,
Mesdames et Messieurs,

Permettez-moi tout d’abord de remercier chaleureusement le président du Nicaragua, Daniel Ortega, son gouvernement, et le peuple du Nicaragua, pour l’accueil chaleureux qui nous est fait une nouvelle fois, à l’occasion de ce séminaire régional.

Je voudrais de même remercier les membres du comité spécial des 24 ainsi que son président Mr Rafael Darío Ramírez Carreño pour cette invitation, à participer aux travaux de ce séminaire, en ma qualité d’ancien président du FLNKS, signataire de l’accord de Nouméa de 1998 et président du groupe politique indépendantiste, le groupe UC-FLNKS et Nationalistes, au congrès de la Nouvelle Calédonie.

Comme nous l’avons souvent rappelé devant les instances de l’ONU, depuis la prise de possession de la Nouvelle Calédonie en 1853, le peuple kanak n’a cessé de subir une colonisation de peuplement par la France. Celle-ci se poursuit encore de nos jours, malgré le processus de décolonisation en cours depuis les Accords de Matignon (1988) et de Nouméa (1998), malgré l’engagement de l’Etat, en 1988, à réduire les flux migratoires de ses nationaux français, malgré enfin les dispositions de la charte de 1960 et des diverses résolutions prorogeant les décennies pour l’éradication du colonialisme.

Cette colonisation de peuplement a rendu le peuple kanak peu à peu minoritaire dans sur sa propre terre. Or, notre pays est aujourd’hui à un point crucial de son histoire puisque nous arrivons au terme de l’Accord de Nouméa et qu’à partir de 2018, la population concernée sera appelée à s’autodéterminer lors d’une consultation sur l’accession du pays à la pleine souveraineté.

En ce sens, une question fondamentale se pose pour la Nouvelle-Calédonie, qui va fêter cette année ses 30 ans de réinscription sur la liste des territoires non autonomes des Nations Unies, c’est-à-dire depuis 1986. Cette question est la suivante : la colonisation de la Nouvelle-Calédonie par la France est-elle un dossier politiquement clos ?

Nous, peuple kanak, peuple colonisé de Nouvelle-Calédonie, affirmons avec force que la colonisation de la Nouvelle-Calédonie par la France n’est pas un dossier politiquement clos.
Nous souhaitons aujourd’hui à travers cette intervention poser également cette question au Comité de décolonisation des Nations Unies : pensez-vous que la colonisation de la Nouvelle-Calédonie par la France est un dossier politiquement clos ?

Pourtant, c’est ce que tente de faire croire notre puissance administrante, la France, aux populations locales, comme devant les instances internationales concernées. Elle se donne le droit de décider unilatéralement de ce qui est politiquement clos ou non dans le processus de décolonisation en cours dans notre pays.

En effet lors du dernier Comité des signataires de l’accord de Nouméa qui s’est tenu à Paris en février 2016, les représentants de l’Etat français en position majoritaire avec leurs alliés calédoniens non-indépendantistes, ont déclaré et imposé à la minorité indépendantiste la fait que le contentieux concernant le corps électoral provincial, était « politiquement clos », faisant croire toutefois que cette entente était celle des trois partenaires de l’Accord de Nouméa : puissance administrante, partis indépendantistes et partis non indépendantistes. Dans les faits cette décision a été prise à la majorité et non suivant le principe du consensus pratiqué habituellement. Ainsi le colonisateur décide de ce qui est "politiquement clos" et se sert des groupes politiques issus de sa colonie de peuplement pour imposer sa volonté politique contre celle des indépendantistes kanak. Cette situation étant la conséquence de la politique de peuplement de nationaux français en Nouvelle Calédonie, une politique dument réfléchie et organisée. Ayant pris de l’ampleur à partir de la visite du général De Gaulle en 1956, cette politique qui s’est accélérée dans les années 70 et à la suite des accords de Matignon (1988) et Nouméa (1998) avait qu’un seul objectif, noyer définitivement sous le nombre, la revendication nationaliste kanak.

Fort de ces décisions, la puissance administrante poursuit dès lors les déclarations dans ce sens, comme l’a fait le premier ministre Manuel Valls dans son discours au Congrès de la Nouvelle-Calédonie le 29 avril dernier, décrétant ainsi que les décisions des commissions administratives spéciales sur l’établissement et la révision des listes électorales pour les élections provinciales et les élections référendaires de 2018, se feront sur la base des soi-disant accords politiques des Comités des signataires, et non plus sur la base de la loi.
De plus, alors que 2016 est la première année de préparation de la liste électorale spéciale pour la consultation sur l’accession du pays à la pleine souveraineté, nous découvrons que 25 000 Kanak ne pourront pas être inscrits sur cette liste sous prétexte qu’ils ne sont pas préalablement inscrits sur la liste générale de Nouvelle-Calédonie. 25 000 Kanak ne pourront donc pas exercer leur droit à l’autodétermination, revendiqué depuis plus de 40 ans en tant que seul peuple autochtone et colonisé de Nouvelle-Calédonie. Mais alors qui est concerné par l’autodétermination de notre pays, c’est la question que l’on peut se poser ?

Il convient ainsi de considérer dans quelle mesure la puissance administrante respecte ses engagements nationaux et internationaux en ce qui concerne le processus de décolonisation de la Nouvelle Calédonie. Prépare-t-elle ce Territoire non autonome à sa décolonisation et à un acte d’autodétermination pleinement libre, transparent et donc acceptable ou met-elle en place toutes les conditions pour que ce Territoire non autonome demeure au sein de son ensemble ultramarin au nom des intérêts supérieurs de la nation et de sa place dans le monde ? Joue-t-elle franc jeu dans la mise en œuvre du processus de décolonisation et d’émancipation ou pose-t-elle des obstacles permanents freinant ce processus ?

Nous ne sommes pas dupes des manœuvres récurrentes de notre colonisateur et malheureusement pour nous, peuple kanak, la colonisation de la Nouvelle-Calédonie par la France est loin d’être politiquement close. L’indépendance de notre pays devant se gagner par le vote, la définition du corps électoral est depuis bien longtemps un enjeu central, c’est question constitue la « mère des batailles ». L’histoire coloniale montre que la puissance administrante a toujours usé et abusé de manœuvres en la matière : double collège, colonie de peuplement, vrais faux référendum coloniaux, trucage des listes, etc. L’objectif est de s’assurer que le peuple kanak et les indépendantistes soient minoritaires et ainsi faire barrage à l’indépendance selon sa politique de ligne rouge de l’indépendance interdite. Ainsi le mouvement indépendantiste doit -il à chaque fois se battre contre cette politique tendant à favoriser l’implantation de populations extérieures afin de noyer le peuple kanak démographiquement et d’empêcher l’indépendance du pays. La « démocratie » par l’immigration incontrôlée et les fraudes électorales devient une arme mortelle contre le peuple colonisé. La lecture du rapport des observateurs de l’ONU à l’œuvre en Nouvelle Calédonie de mars à juillet 2015 apportera un éclairage à ce niveau.

Depuis des décennies, le mouvement indépendantiste kanak fait face à ces types de stratégies orchestrés pour contrer l’indépendance. Récemment encore le mouvement indépendantiste a subi des tentatives de division qui ne sont encore que des manœuvres supplémentaires parmi toutes celles déjà subies en plus des assassinats de leurs leaders, la plus part d’entre eux restant d’ailleurs sans enquête fiable sur les circonstances de ces drames.
Nous sommes parfaitement conscients que ces stratégies existent et nous savons identifier les commanditaires derrière les petites mains à la manœuvre ou au-delà des propos lénifiant de certains responsables affirmant que l’Etat est un arbitre impartial et équidistant et qu’in fine ce seront les calédoniens qui décideront de leur destin par référendum.

Ainsi la puissance administrante se donne en Nouvelle-Calédonie le rôle d’arbitre et de « facilitateur », selon ses propres mots, notamment dans le dossier de préparation de l’avenir institutionnel du pays, et comme si elle n’était pas responsable du fait colonial de notre pays. Toujours fidèle à sa devise : garder la Nouvelle Calédonie française, la France colonisatrice prépare encore une fois un nouvel accord qui lui permettra de préserver ses intérêts en Nouvelle-Calédonie. Un dispositif de type « France Afrique » est bien le modèle qui nous est préparé. Le risque encouru serait que la consultation sur l’accession du pays à la pleine souveraineté porte sur un nouvel accord au lieu de porter sur l’autodétermination et sur l’indépendance du peuple kanak et des citoyens de la Nouvelle-Calédonie.

Face à une politique d’intégration et d’assimilation de la puissance administrante, aux effets néfastes et parfois dévastateurs, prenant parfois l’allure d’un « génocide culturel » pour le peuple kanak, permettez-moi de réitérer les demandes déjà formulées l’an passé ici même. Que l’ONU puisse pérenniser ses visites en Nouvelle Calédonie dans la perspective de l’acte d’autodétermination prévu en fin 2018,et qu’ au cours de cette période un séminaire de décolonisation soit organisé à Nouméa. Par ailleurs nous sollicitons une implication soutenue du Comité de décolonisation afin d’aider la Nouvelle Calédonie dans les procédures d’établissement et la révision des listes électorales spéciales dans le cadre de la préparation de la consultation sur l’accession du pays à la pleine souveraineté. Nous souhaitons enfin pouvoir bénéficier d’experts de haut niveau dans le cadre de la réflexion sur les transferts des compétences régaliennes. Tout ceci nous semble capital dans le processus de décolonisation en cours. Bien évidemment un dialogue permanent et constructif avec la puissance administrante reste un passage obligé.

Nous souhaitons également profiter de l’occasion de cette prise de parole pour remercier sincèrement et chaleureusement l’équipe d’experts, et son président Flavien Misoni, mandatés par l’Assemblée générale des Nations Unies pour observer le travail des commissions administratives spéciales d’établissement et de révision des listes électorales et de la commission consultative d’experts. Leur rôle est ô combien important pour notre peuple et notre pays.

Je vous remercie

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24 octobre 2014 5 24 /10 /octobre /2014 18:46

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