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  • Roch WAMYTAN
  • Homme politique, membre de l'Union Calédonienne et du FLNKS, Signataire de l'accord de Nouméa en 1998, Président du groupe UC-FLNKS et Nationalistes au Congrès de la Nouvelle-Calédonie
  • Homme politique, membre de l'Union Calédonienne et du FLNKS, Signataire de l'accord de Nouméa en 1998, Président du groupe UC-FLNKS et Nationalistes au Congrès de la Nouvelle-Calédonie

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Citoyenneté calédonienne socle du destin commun
Présentation d'une loi de pays proposant le drapeau du FLNKS comme drapeau du Pays                   
   
Bilan des déplacements dans la région du président du Congrès (coopération interparlementaire)         
       

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8 novembre 2016 2 08 /11 /novembre /2016 09:17

Roch WAMYTAN, président du groupe UC FLNKS et Nationalistes

Madame la Ministre des Outremer,

Messieurs les représentants du président de la République,

Mesdames et messieurs,

Monsieur le Premier ministre,

       Je voudrais tout d’abord vous remercier pour la teneur de votre discours d’ouverture de ce Comité des signataires qui revêt, pour notre groupe, une importance particulière car c’est l’occasion de lever toutes les hypothèques qui risquent d’entraver le bon déroulement de la consultation sur l’accession du pays à la pleine souveraineté, aboutissement du processus de décolonisation de l’Accord de Nouméa de 1998, débuté avec la déclaration de Nainville-les-Roches en 1983 et les Accords de Matignon-Oudinot en 1988.

            Ce Comité des signataires est également le dernier avant les élections présidentielles et législatives françaises de 2017, il est aussi l’occasion de relever quelques remarques significatives sur l’action politique des gouvernements socialistes dans notre pays. Depuis l’élection du président François Mitterrand en  mai 1981, à mai 2017, les aléas de la vie institutionnelle française auront conduit le parti socialiste et ses alliés à gérer les affaires calédoniennes une vingtaine d’années sur les 36 ans qui vont nous séparer de la promesse faite par le candidat François Mitterrand à nos ainés de l’époque, celle de voir un jour notre pays accéder à l’indépendance.

         C’est avec cette double préoccupation en tête, la promesse de 1981 et les accords avec les dispositifs d’accompagnement mis en place que nous souhaitons vous faire connaître nos positions sur les points de l’ordre du jour. Promesse et accords, deux expressions d’une parole de vie partagée. Vous nous connaissez bien désormais Mr le premier ministre pour savoir l’importance que notre vieille civilisation mélanésienne millénaire attache à la Parole. Vous savez aussi qu’un manquement à la parole donnée peut être source de conflit par la rupture des liens de confiance pouvant conduire à la destruction, car telle est la destinée de la Parole partagé, elle est source de vie mais elle peut aussi causer la mort en cas de défaillance volontaire et calculée de l’une des parties. L’histoire de nos relations de ces trois dernières décennies reste émaillée de ces ruptures à répétition. Mais à chaque fois, nous, hommes de consensus issus de cette terre océanienne, avons toujours choisi de rebondir pour préférer la vie à la mort.

Mr le premier ministre

Sur l’avenir institutionnel

Concernant l’avenir institutionnel, nous avons pris connaissance du Rapport de la mission d’étude et de conseil sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie. Nous considérons simplement ce rapport comme une contribution supplémentaire au débat sur l’évolution institutionnelle de notre Pays, élaboré à partir d’une méthode proposée par l’Etat. Néanmoins, il nous paraît primordial qu’il soit complété par le travail d’experts internationaux, spécialistes des questions relatives aux compétences régaliennes. Cette demande a déjà été effectuée par notre groupe à de multiples occasions, notamment durant les comités de pilotage et nous souhaitons que l’Etat prenne des mesures concrètes pour y répondre. Nous avons d’ores et déjà transmis des noms d’experts acceptant la tâche de soumettre leurs analyses.

Par ailleurs, l’Union Calédonienne a souhaité apporter sa contribution en élaborant un document résumant sa vision de la future Nation. A l’occasion de ce Comité des signataires, la délégation de l’Union Calédonienne a ainsi communiqué son document « Après 2018, notre vision de la Nation » lors de ses rencontres bilatérales. Il n’est pas exclu, que les autres partis politiques représentés au sein du groupe que je préside au congrés de la Nouvelle Calédonie aient aussi la possibilité d’en faire autant dans les prochains mois.

Monsieur le premier ministre,

 

Sur la liste électorale spéciale de consultation

S’agissant de la liste électorale spéciale de consultation, la composition de cette liste est pour nous déterminante car elle est au cœur même de cette Parole de vie partagée que je citais précédemment : l’engagement à nous permettre d’exercer  notre droit à l’autodétermination dans les meilleurs conditions possibles à l’instar de tout peuple ayant été colonisé à un moment de son histoire. Notre participation à la consultation référendaire de 2018 sera examinée à l’aune du respect  de cette parole donnée. Et ce d’autant plus que nous avons su, avec générosité, partager notre droit  à l’autodétermination avec ceux qui ont fait de la Nouvelle Calédonie, leur pays au même titre que nous.

L’Accord de Nouméa étant avant toute chose un processus de décolonisation, nous considérons que l’ensemble des Kanak, seul peuple colonisé, doit pouvoir participer à une consultation issue d’une demande historique de sa part, et expression, par le vote, de son droit à l’autodétermination et à l’indépendance, résultat logique de la prise de possession de la Nouvelle-Calédonie par la France dans un monde ayant évolué depuis vers le droit à la liberté et à la libre disposition des peuples.

Par conséquent, nous demandons que tous les Kanak soient automatiquement inscrits sur la liste électorale spéciale de consultation, une demande qui trouve toute sa justification dans le point 2 de la Résolution 1514 de l'Assemblée générale des Nations Unies du 14 décembre 1960, « Tous les peuples ont le droit de libre détermination ; en vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et poursuivent librement leur développement économique, social et culturel ».

Monsieur le premier ministre

Sur le nickel

         Concernant le rapport de Mr Michel Colin et afin d’avancer plus sûrement dans la définition d’une stratégie industrielle, l’Union Calédonienne souhaite que la méthode soit redéfinie avec la constitution d’un groupe de travail composé de représentants des groupes politiques du congrès, disposant de la possibilité de valider des objectifs intermédiaires et opérationnels : développement d’une diplomatie dans le secteur nickel, restructuration et renforcement des outils de gestion du Pays dans le secteur (Dimenc…).

Sur la situation de l’usine du Nord

Par ailleurs, il est indéniable que ce Comité des signataires puisse exprimer une position sur la situation de l’usine du Nord. Après des décennies de promesses non tenues, la forte mobilisation des indépendantistes a permis d’enclencher, enfin, une vraie démarche de rééquilibrage en permettant la construction de l’usine de KNS. Aujourd’hui, du fait d’un contexte économique et financier exceptionnellement difficile, cette réalisation est en danger malgré une intervention financière importante de la province Nord. L’annonce du licenciement d’employés locaux en est la conséquence récente, à nos yeux, il s’agit là d’une conséquence absolument inacceptable.

Ce grand chantier a suscité d’immenses espoirs qui ne peuvent être déçus car la bonne évolution du Pays est en jeu. Il est de la responsabilité de l’ensemble des actionnaires de KNS, de la classe politique calédonienne et de l’Etat de réunir toutes les conditions pour aider l’opérateur à passer ce cap difficile. A cet effet, l’Union Calédonienne demande que l’Etat intervienne pour aider la province Nord à faire face aux difficultés de sa SEM et pour lui permettre de retrouver un nouveau souffle lorsque le contexte économique international se rétablira.

Monsieur le premier ministre,

Sur les contrats de développement

Sur la question des contrats de développement, et conformément à l’article 211 de la Loi organique, la prochaine génération de ces contrats de développement 2017-2021 a été élaborée à partir d’un dialogue entre l’Etat et les collectivités calédoniennes. Mais ce qui diffère de la génération précédente, c’est l’adoption récente par le congrès du schéma d’aménagement et de développement de la Nouvelle-Calédonie NC2025 et il importe désormais que, selon les dispositions de l’article 211, les prochains contrats de développement soient pleinement compatibles avec ledit schéma et que nous puissions définir dans ce cadre, ensemble, les secteurs à privilégier.

Il importe aussi que la nouvelle génération de ces contrats, dispositif prévu pour accélérer le développement et le rééquilibrage, fasse l’objet, du fait des agendas budgétaires, d’une signature à la mi-novembre et d’inscriptions budgétaires dans la Loi de finances 2017, afin de pouvoir porter leurs effets au plus tôt, du fait que nous sommes dans la dernière phase de l’Accord de Nouméa.

Notre délégation sollicite par ailleurs toute votre attention pour que ce 15ième comité des signataires prenne en considération les demandes que le président du sénat coutumier formulera tout à l’heure pour que le financement des politiques publiques relatif à l’identité kanak soit prise en compte dans cette nouvelle génération des contrats 2017-2021. Ces demandes relevant de la charte des valeurs kanak, du plan Marshall ou des ZODEP (zone de développement prioritaire) pourraient faire l’objet d’un financement dédié ou intégrées dans les propositions des institutions calédoniennes.

 

Les transferts prévus à l’article 27 de la Loi organique

Par ailleurs, nous réaffirmons notre position maintes fois exprimés, qu’ il ne fait aucun doute que les transferts prévus à l’article 27 n’ont rien d’optionnel et que leur mise en œuvre relève de la seule responsabilité de l’Etat.

Monsieur le Premier ministre,

Sur la problématique de progression de la délinquance

Avant de clore mon propos je voudrais, dans la suite logique de la réunion d’avant hier au ministère de l’intérieur, rapidement esquisser la problématique de progression de la délinquance juvénile dans notre pays. Comme je l’ai exprimé de nombreuse fois au congrès, nous souhaitons que le sujet de la sécurité ne fasse pas l’objet d’une exploitation politicienne, au gré des échéances électorales, et soit traité au niveau de ce qu’il est : un problème de société, qui résulte en partie des déséquilibres engendrés par le système colonial.

Il nous paraît essentiel de cerner au préalable les causes profondes de cette problématique afin de définir les moyens les plus adaptés au contexte local pour solutionner durablement ce phénomène. Il nous semble en effet évident que se précipiter sur des mesures répressives ne résoudra rien sur le long terme. Bien au contraire cela risque de nous entrainer dans une spirale infernale risquant d’aboutir à de nouveaux drames humains tels que celui que  le pays vient de connaitre le 29 octobre dernier avec la mort du jeune William DECOIRE, les six gendarmes blessés, les milliers de personnes empêchées de rejoindre leurs domiciles, sans compter  les millions de dégâts causés aux collectivités ou aux biens privés. La construction du destin commun doit être préservée, en toute priorité, elle ne peut pas se fracasser et  éclater en mille morceaux contre une problématique dont on n’aura mal évalué ensemble la façon la plus intelligente et la plus sage de la traiter.

Aussi, nous réitérons notre demande d’un débat sur le sujet au congrès de la Nouvelle-Calédonie et faisons la proposition d’un groupe de travail pluridisciplinaire auquel participeraient des coutumiers et des experts, ou universitaires, spécialistes des questions culturelles, sociales et éducatives.

Pour finir, nous demandons que la réunion technique qui se tient traditionnellement le lendemain du comité soit reportée pour se tenir à Nouméa avant la fin de cette année. En effet, vous n’êtes pas sans savoir que les congrès de nos mouvements se déroulent toujours à la mi-novembre, des moments importants qui exigent que la plupart de nos représentants reprennent l’avion juste après la clôture du comité.

Monsieur le Premier ministre,

En guise de conclusion de mes propos, je dirai que l’année 2017 sera pour nous indépendantistes, l’année d’une vigilance extrême, du fait des deux grandes élections nationales que sont les présidentielles et les législatives. Car on peut légitimement se poser la question du dossier de l’avenir de la Nouvelle Calédonie dans la campagne des divers partis politiques français plus divisés que jamais aussi bien à droite qu’à gauche avec en toile de fond, la montée croissante du front national surfant sur ces divisions. Le dossier Calédonien ne risque-t-il pas d’être instrumentalisé par les partis en course  comme dans les années 1980 et notamment en 1988 à Ouvéa ?

2018, année de tous les dangers lorsque nous observons les incertitudes qui pèsent sur l’organisation de la consultation référendaire et son déroulement. Ou encore lorsque nous observons les options qui nous sont présentées pour nous mener vers un 3ième accord ou une fausse indépendance de type françafrique.

         L’histoire nous pousse à une constante vigilance dans les stratégies politiques mises en œuvre. L’histoire des décolonisations, de même que notre histoire commune avec la France depuis 163 ans nous ont appris que nous aurons à chaque fois à nous battre et parfois à négocier avec une puissance coloniale, en même temps puissance mondiale dont l’intérêt supérieur de la nation tentera toujours d’avoir le dernier mot sur le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes par l’application du principe d’une ligne rouge de l’indépendance à ne pas franchir. Mais les stratégies qui en découlent impactent violemment la cohésion du peuple kanak participant ainsi à sa lente implosion dont la dérive d’une partie de sa jeunesse est le signe visible d’un mal être profond.

Au nom de ma délégation, je vous remercie Monsieur le Premier ministre pour votre implication constante dans le dossier calédonien depuis votre prise de fonction et comme il s’agit de notre dernière rencontre dans ce format comité des signataires, je vous souhaite bonne chance pour les élections nationales de 2017.

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5 septembre 2016 1 05 /09 /septembre /2016 19:08
Question of the integration of New Caledonia as a full member of the Pacific Islands Forum

Roch WAMYTAN

UC-FLNKS and NATIONALISTS Group

FLNKS Signatory of the Noumea Accord

President of the Group Congress of New Caledonia

rockwamytan@hotmail.com

roch.wamytan@congres.nc

To H.E. Dame Meg TAYLOR Secretary General to the Pacific Islands Forum

Noumea, 5th September 2016

Subject: Question of the integration of New Caledonia as a full member of the Pacific Islands Forum

Excellency, During the 47th Summit of the Pacific Islands Forum (PIF) which will be held from September 7 to 11, 2016, in Pohnpei, Federates States of Micronesia, the candidacy of New Caledonia to the status of full member will be again examined.

In this way, considering the current political situation in Kanaky/New Caledonia, particularly in the prospect of electoral consultation on the achievement of full sovereignty of the country which is planned from 2018, I am writing to send you the position of my political group at the Congress of New Caledonia, shared also by the FLNKS1 .

This letter is in the continuity of the letter I sent you already last year. First, let me remind the role of the PIF in the international support of the Kanak people's struggle, in particularly within the framework of the reinscription, in 1986, of 1 Until now, during all the FLNKS Congresses, no motion was passed in the direction of an agreement for the change of status of New Caledonia in the PIF. New Caledonia on the United Nations list of Non Self Governing Territories.

This support was able to be developed, among others, under the aegis of our countries brothers of the Melanesia. Indeed, since 1986, the FLNKS benefits a special guest status as an observer member of the PIF. In 1998, after the signing of the Nouméa Accord which involved the country in a process of emancipation and decolonization, the Kanak independentists have accepted to integrate the government of New Caledonia at the time and place of the FLNKS as observer member within the PIF. This open-mindedness gesture was made during the PIF's summit in Palau in 1999. Besides, in 2006, New Caledonia became associate member of the PIF.

In September 2013, following a mission of the ministerial committee in New Caledonia, the executives of the organization recognized the legitimacy of the New Caledonian candidacy for the status of full member within PIF. Unfortunately, since 2006, we notice a sidelining of the independentist executives concerning all the decisions, as political as diplomatic, relative to the PIF, taken by the government of New Caledonia. Moreover I had informed Mr Henri PUNA of this problem, in 2013, during the mission of the ministerial committee. As signatory of the Noumea Accord, I have called out on several occasions the partners of this accord on the respect for its sincere and whole implementation.

The Melanesian Spearhead Group, the PIF and the United Nations Special Committee on Decolonization were also notified on the problems that our country crosses, in particular on the question of the establishment and the revision of the special electoral rolls for the provincial elections and for the consultation on the country's achievement of full sovereignty.

As you know, Oceania is today considered as the new center of the world growth, provided with a considerable potential which can raise the challenges of the 21th century (energy, raw materials, halieutic resources, etc.). So, it is clear that France, in the name of its greatness, of its place in the world, of its best interests, of its rank of the second naval strength in the world behind the USA, wishes to ensure to keep the sovereign powers in New Caledonia. Recently, a symposium organized by the French Senate in January 2013, in Paris, confirmed again the interest of France for its French territories of the Pacific.

The speakers of this symposium thus recommended to defend in this continent the best interests of France in connection with the public and private French companies. France also defends its own interests by using the French territories as a bridgehead or support base.

Concerning French overseas territories, the President François Hollande during his tour of the « last French colonies » had a constant in his speeches: « France is present all around the world, a country where the sun never goes down, France is a country of Oceania, Indian Ocean, America, the Atlantic Ocean, Caribbean ».

These declarations express the politic of red line of the forbidden independence which France implements. Sometimes, under the cover of democracy, we can reveal maneuvers of a State trying to assure its domination while putting up a good show in front of the international community. The independentist executives that we are have what to be worried in view of this situation in French overseas territories and taking in consideration the declarations of certain high-level French politicians following the example of President François Hollande during his last journey in New Caledonia in November 2014 asserting in his speech in the Tjibaou Cultural center that the best interests of France are also situated in the Pacific.

Yet, New Caledonia is an oceanian country and France is an european country. The FLNKS gave time to build and reach its independence. Important results were obtained, but serious drifts, further to a deliberated will of confinement from the State, led New Caledonia towards a trapdoor into which France locks it more and more in the name of the best interests of the Nation. For us, it is so out of the question for the moment, and as long as New Caledonia is not independent, that she could obtain the status of full member within the PIF.

In the same line, it is inconceivable for us, as regard to the Melanesian Spearhead Group, that the FLNKS could give its place to the government of New Caledonia. Because it would definitely let France enter in these regional organizations, following the principle of the « Trojan horse », organizations which were of all fights for the Kanak people's independence. Our country which is going to commemorate, on September 24th, 2016, 163 years of taking possession by France, does not have vocation to play eternally the role of casting a favourable light on its administrative power which the only purpose is to claim, in the eyes of the nations of this region, its status of « oceanian » country, to benefit from this position.

The geographical and political reality reminds that France, situated in 20 000 km of the Pacific is an european, and not an oceanian State. To permanently tweak the shot on this basic reality amounts to maintain the colonialist and imperialist system, and paves the way for future situations of conflicts. More than ever New Caledonia, Melanesia and the Pacific, need stability, cohesion and peace. Gain independence peacefully and through negotiation was a difficult choice that we made. The support of regional institutions (PIF, MSG) and Independent States of the region is crucial for our people and our country. Indeed, the balance of power between the Administering power, France, and the colonized people, the Kanak people, is not in our favor.

If we are engaged for 30 years in a decolonization process with the signing of the political agreements (Matignon and Noumea) with our colonial power, we believe that it does not want the independence of our country. We are today in the last mandate of the Noumea Accord, and the political development of these last months does not allow us to envisage the granting, to New Caledonia, of a status of full member within the PIF.

In this way, allow non-independent and non-autonomous countries to become full member of the PIF is equivalent to bring our colonial power as a full member. Because the sovereign powers and full sovereignty is always that of the colonial power. Support for regional institutions and independent countries in the region is indispensable in our fight for independence. Considering elements developed above, I am writing to ask for your understanding, kindness, and support of your high authority to postpone the examination of the candidacy of New Caledonia to the status of full member of the Pacific Islands Forum.

Finally, I inform you that brother countries of our Pacific region, the Melanesian Spearhead Group, and the President of the United Nations Special Committee of Decolonization, were also seized on this matter.

Please accept, Excellency, the assurances of my highest consideration.

President of the UC-FLNKS and Nationalists Group Former president of the Congress of New Caledonia (2011-2012/2013-2014) Former president of the Melanesian Spearhead Group (2001-2003) Former president of the FLNKS (1995-2001) Roch WAMYTAN

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7 juin 2016 2 07 /06 /juin /2016 20:06
 La colonisation en Nouvelle-Calédonie: un dossier politiquement clos?

PACIFIC REGIONAL SEMINAR OF THE SPECIAL COMMITTEE OF 24

“Implementation of the Third International Decade for the Eradication of Colonialism: commitments and actions for decolonization in the Non-Self-Governing Territories”

Managua, Nicaragua 31 May to 2 June 2016

M. Roch Wamytan
President of the UC-FLNKS and Nationalists Group
at the Congress of New Caledonia

Monsieur le Président du Comité spécial de décolonisation,

Mesdames et Messieurs les membres du Comité spécial de décolonisation,
Mesdames et Messieurs,

Permettez-moi tout d’abord de remercier chaleureusement le président du Nicaragua, Daniel Ortega, son gouvernement, et le peuple du Nicaragua, pour l’accueil chaleureux qui nous est fait une nouvelle fois, à l’occasion de ce séminaire régional.

Je voudrais de même remercier les membres du comité spécial des 24 ainsi que son président Mr Rafael Darío Ramírez Carreño pour cette invitation, à participer aux travaux de ce séminaire, en ma qualité d’ancien président du FLNKS, signataire de l’accord de Nouméa de 1998 et président du groupe politique indépendantiste, le groupe UC-FLNKS et Nationalistes, au congrès de la Nouvelle Calédonie.

Comme nous l’avons souvent rappelé devant les instances de l’ONU, depuis la prise de possession de la Nouvelle Calédonie en 1853, le peuple kanak n’a cessé de subir une colonisation de peuplement par la France. Celle-ci se poursuit encore de nos jours, malgré le processus de décolonisation en cours depuis les Accords de Matignon (1988) et de Nouméa (1998), malgré l’engagement de l’Etat, en 1988, à réduire les flux migratoires de ses nationaux français, malgré enfin les dispositions de la charte de 1960 et des diverses résolutions prorogeant les décennies pour l’éradication du colonialisme.

Cette colonisation de peuplement a rendu le peuple kanak peu à peu minoritaire dans sur sa propre terre. Or, notre pays est aujourd’hui à un point crucial de son histoire puisque nous arrivons au terme de l’Accord de Nouméa et qu’à partir de 2018, la population concernée sera appelée à s’autodéterminer lors d’une consultation sur l’accession du pays à la pleine souveraineté.

En ce sens, une question fondamentale se pose pour la Nouvelle-Calédonie, qui va fêter cette année ses 30 ans de réinscription sur la liste des territoires non autonomes des Nations Unies, c’est-à-dire depuis 1986. Cette question est la suivante : la colonisation de la Nouvelle-Calédonie par la France est-elle un dossier politiquement clos ?

Nous, peuple kanak, peuple colonisé de Nouvelle-Calédonie, affirmons avec force que la colonisation de la Nouvelle-Calédonie par la France n’est pas un dossier politiquement clos.
Nous souhaitons aujourd’hui à travers cette intervention poser également cette question au Comité de décolonisation des Nations Unies : pensez-vous que la colonisation de la Nouvelle-Calédonie par la France est un dossier politiquement clos ?

Pourtant, c’est ce que tente de faire croire notre puissance administrante, la France, aux populations locales, comme devant les instances internationales concernées. Elle se donne le droit de décider unilatéralement de ce qui est politiquement clos ou non dans le processus de décolonisation en cours dans notre pays.

En effet lors du dernier Comité des signataires de l’accord de Nouméa qui s’est tenu à Paris en février 2016, les représentants de l’Etat français en position majoritaire avec leurs alliés calédoniens non-indépendantistes, ont déclaré et imposé à la minorité indépendantiste la fait que le contentieux concernant le corps électoral provincial, était « politiquement clos », faisant croire toutefois que cette entente était celle des trois partenaires de l’Accord de Nouméa : puissance administrante, partis indépendantistes et partis non indépendantistes. Dans les faits cette décision a été prise à la majorité et non suivant le principe du consensus pratiqué habituellement. Ainsi le colonisateur décide de ce qui est "politiquement clos" et se sert des groupes politiques issus de sa colonie de peuplement pour imposer sa volonté politique contre celle des indépendantistes kanak. Cette situation étant la conséquence de la politique de peuplement de nationaux français en Nouvelle Calédonie, une politique dument réfléchie et organisée. Ayant pris de l’ampleur à partir de la visite du général De Gaulle en 1956, cette politique qui s’est accélérée dans les années 70 et à la suite des accords de Matignon (1988) et Nouméa (1998) avait qu’un seul objectif, noyer définitivement sous le nombre, la revendication nationaliste kanak.

Fort de ces décisions, la puissance administrante poursuit dès lors les déclarations dans ce sens, comme l’a fait le premier ministre Manuel Valls dans son discours au Congrès de la Nouvelle-Calédonie le 29 avril dernier, décrétant ainsi que les décisions des commissions administratives spéciales sur l’établissement et la révision des listes électorales pour les élections provinciales et les élections référendaires de 2018, se feront sur la base des soi-disant accords politiques des Comités des signataires, et non plus sur la base de la loi.
De plus, alors que 2016 est la première année de préparation de la liste électorale spéciale pour la consultation sur l’accession du pays à la pleine souveraineté, nous découvrons que 25 000 Kanak ne pourront pas être inscrits sur cette liste sous prétexte qu’ils ne sont pas préalablement inscrits sur la liste générale de Nouvelle-Calédonie. 25 000 Kanak ne pourront donc pas exercer leur droit à l’autodétermination, revendiqué depuis plus de 40 ans en tant que seul peuple autochtone et colonisé de Nouvelle-Calédonie. Mais alors qui est concerné par l’autodétermination de notre pays, c’est la question que l’on peut se poser ?

Il convient ainsi de considérer dans quelle mesure la puissance administrante respecte ses engagements nationaux et internationaux en ce qui concerne le processus de décolonisation de la Nouvelle Calédonie. Prépare-t-elle ce Territoire non autonome à sa décolonisation et à un acte d’autodétermination pleinement libre, transparent et donc acceptable ou met-elle en place toutes les conditions pour que ce Territoire non autonome demeure au sein de son ensemble ultramarin au nom des intérêts supérieurs de la nation et de sa place dans le monde ? Joue-t-elle franc jeu dans la mise en œuvre du processus de décolonisation et d’émancipation ou pose-t-elle des obstacles permanents freinant ce processus ?

Nous ne sommes pas dupes des manœuvres récurrentes de notre colonisateur et malheureusement pour nous, peuple kanak, la colonisation de la Nouvelle-Calédonie par la France est loin d’être politiquement close. L’indépendance de notre pays devant se gagner par le vote, la définition du corps électoral est depuis bien longtemps un enjeu central, c’est question constitue la « mère des batailles ». L’histoire coloniale montre que la puissance administrante a toujours usé et abusé de manœuvres en la matière : double collège, colonie de peuplement, vrais faux référendum coloniaux, trucage des listes, etc. L’objectif est de s’assurer que le peuple kanak et les indépendantistes soient minoritaires et ainsi faire barrage à l’indépendance selon sa politique de ligne rouge de l’indépendance interdite. Ainsi le mouvement indépendantiste doit -il à chaque fois se battre contre cette politique tendant à favoriser l’implantation de populations extérieures afin de noyer le peuple kanak démographiquement et d’empêcher l’indépendance du pays. La « démocratie » par l’immigration incontrôlée et les fraudes électorales devient une arme mortelle contre le peuple colonisé. La lecture du rapport des observateurs de l’ONU à l’œuvre en Nouvelle Calédonie de mars à juillet 2015 apportera un éclairage à ce niveau.

Depuis des décennies, le mouvement indépendantiste kanak fait face à ces types de stratégies orchestrés pour contrer l’indépendance. Récemment encore le mouvement indépendantiste a subi des tentatives de division qui ne sont encore que des manœuvres supplémentaires parmi toutes celles déjà subies en plus des assassinats de leurs leaders, la plus part d’entre eux restant d’ailleurs sans enquête fiable sur les circonstances de ces drames.
Nous sommes parfaitement conscients que ces stratégies existent et nous savons identifier les commanditaires derrière les petites mains à la manœuvre ou au-delà des propos lénifiant de certains responsables affirmant que l’Etat est un arbitre impartial et équidistant et qu’in fine ce seront les calédoniens qui décideront de leur destin par référendum.

Ainsi la puissance administrante se donne en Nouvelle-Calédonie le rôle d’arbitre et de « facilitateur », selon ses propres mots, notamment dans le dossier de préparation de l’avenir institutionnel du pays, et comme si elle n’était pas responsable du fait colonial de notre pays. Toujours fidèle à sa devise : garder la Nouvelle Calédonie française, la France colonisatrice prépare encore une fois un nouvel accord qui lui permettra de préserver ses intérêts en Nouvelle-Calédonie. Un dispositif de type « France Afrique » est bien le modèle qui nous est préparé. Le risque encouru serait que la consultation sur l’accession du pays à la pleine souveraineté porte sur un nouvel accord au lieu de porter sur l’autodétermination et sur l’indépendance du peuple kanak et des citoyens de la Nouvelle-Calédonie.

Face à une politique d’intégration et d’assimilation de la puissance administrante, aux effets néfastes et parfois dévastateurs, prenant parfois l’allure d’un « génocide culturel » pour le peuple kanak, permettez-moi de réitérer les demandes déjà formulées l’an passé ici même. Que l’ONU puisse pérenniser ses visites en Nouvelle Calédonie dans la perspective de l’acte d’autodétermination prévu en fin 2018,et qu’ au cours de cette période un séminaire de décolonisation soit organisé à Nouméa. Par ailleurs nous sollicitons une implication soutenue du Comité de décolonisation afin d’aider la Nouvelle Calédonie dans les procédures d’établissement et la révision des listes électorales spéciales dans le cadre de la préparation de la consultation sur l’accession du pays à la pleine souveraineté. Nous souhaitons enfin pouvoir bénéficier d’experts de haut niveau dans le cadre de la réflexion sur les transferts des compétences régaliennes. Tout ceci nous semble capital dans le processus de décolonisation en cours. Bien évidemment un dialogue permanent et constructif avec la puissance administrante reste un passage obligé.

Nous souhaitons également profiter de l’occasion de cette prise de parole pour remercier sincèrement et chaleureusement l’équipe d’experts, et son président Flavien Misoni, mandatés par l’Assemblée générale des Nations Unies pour observer le travail des commissions administratives spéciales d’établissement et de révision des listes électorales et de la commission consultative d’experts. Leur rôle est ô combien important pour notre peuple et notre pays.

Je vous remercie

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6 mars 2016 7 06 /03 /mars /2016 09:46
34ème congrès du FLNKS le 05 et 06 mars 2016

"Sérénité et confiance pour gagner 2018", du 05 au 06 mars le FLNKS se réuni en congrès à KOWE KARA - Nouméa.

La vidéo d'ouverture du 34ème congrès sur ce lien : FLNKS

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9 juin 2015 2 09 /06 /juin /2015 09:18
Comité des signataires extraordinaire (Hôtel MATIGNON, Paris le 5 juin 2015)

Monsieur le Premier Ministre

Madame la Ministre de l’outre-mer
Monsieur le Haut-commissaire
Mesdames et Messieurs

Je voudrais tout d’abord vous remercier Mr le premier ministre pour la teneur de votre discours d’ouverture de ce Comité des signataires extraordinaire dédié au projet de modification de la loi organique relative à l’accession du pays à la pleine souveraineté et notamment lorsque vous confirmez la responsabilité de l’Etat français dans l’application de l’accord de Nouméa et la préparation du dispositif qui succèdera à cet accord. Je voudrai aussi vous remercier pour l’hommage adressé au grand chef Nidoish Naisseline, ce grand humaniste qui aura marqué de son empreinte la vie calédonienne de ces quarante dernières années.

Les sujets de discussion concernant le corps électoral de la consultation référendaire ne manquent pas compte tenu de ce type particulier de consultation. En effet la consultation référendaire ou le référendum d’autodétermination vient clore le processus de décolonisation d’un pays. Comme le disait un secrétaire général des nations Unies, elle vient fermer la parenthèse de la colonisation. Dans l’histoire d’un pays, elle est souvent à coup unique, ou exceptionnellement en une, deux, ou trois fois à l’instar de la Nouvelle Calédonie et ses trois référendums successifs. Cette consultation est parfois qualifiée de mère de bataille car les forces en présence concentrent toutes leurs énergies pour que les options défendues par chacune emportent l’adhésion de la population.


La Nouvelle Calédonie réinscrite depuis 1986 sur la liste des pays à décoloniser de ‘ONU n’échappe pas en cette période à cette explosion d’énergie qui se déclenche à l’approche de tels évènements qu’en général une personne ne vit qu’une seule fois dans sa vie. Et pourtant il s’agit là d’une étape nécessaire car l’acte d’autodétermination permet de redonner la parole à un pays colonisé ou territoire non autonome et à sa population concernée sur son propre devenir. Cette parole devant ainsi déboucher sur les trois options retenues par l’ONU : l’indépendance, l’association ou l’intégration à un autre pays.


Il convient ainsi de réunir toutes les conditions pour que cette consultation s’organise sur des règles claires et transparentes afin que la population concernée puisse s’exprimer en toute conscience et liberté sur les options proposées. Les résultats de cette consultation ne doivent être ni contestés, ni contestables devant la population du territoire non autonome de la Nouvelle Calédonie, la France puissance administrante et les Nations Unies représentant la communauté internationale.


Nous arrivons à un moment de notre histoire où chacun doit avancer l’un vers l’autre comme nous avons su le faire depuis plus de vingt-cinq ans. Ce que nous vivons actuellement vient de très loin, depuis le 18ième siècle et la rencontre de nos différents peuples. Cette histoire s’est façonnée par la sueur et le sang de nos anciens, des liens forts se sont noués, des concessions réciproques se sont réalisées. En ce qui concerne les indépendantistes ces concessions ont porté sur l’ouverture du droit de vote aux personnes arrivées et établies en Nouvelle Calédonie en 1983, lors de l’accord de Nainville les Roches, en 1988 à l’accord de Matignon et en 1998 à l’accord de Nouméa, cette dernière concession étant notre ultime concession. Par ailleurs, des contentieux se sont aussi constitués renforcés et ont perduré, créant de la suspicion, des malentendus et des blocages. Etant des insulaires nous avons dû en faire le quotidien de nos vies.


Le défi qui se pose à nous désormais est de savoir comment réussir le processus de décolonisation, comment faire en sorte de préparer au mieux nos populations à l’acte d’autodétermination afin de réussir sur la séquence des trois référendums, la décolonisation de la Nouvelle Calédonie. La communauté internationale suit de très près cette préparation, le 20 mai dernier à Managua au Nicaragua, chacun de nous a eu l’occasion de donner sa vision devant le séminaire de décolonisation de l’ONU, le Comité des 24 est prêt à nous fournir, sous réserve de l’autorisation du gouvernement français, toute l’aide et le soutien de ses experts dans le cadre de cette préparation. S’agissant de l’Etat, l’assemblée nationale et demain le sénat auront mis en place les groupes de contact nécessaires pour nous accompagner dans ce processus de décolonisation et d’émancipation.


Notre responsabilité à nous calédoniens est sollicitée aujourd’hui pour trouver des solutions viables dans le respect des valeurs et des options portées par chacun. Car le défi est de taille et digne, celui de réussir la décolonisation et l’émancipation de notre pays en mettant en place les conditions maximales devant favoriser l’expression de la population concernée calédonienne. Notre tâche est de donner corps à cette parole à venir à partir de 2018.


Mais les règles du jeu doivent être claires et leur application sans ambiguïté aucune, que ce soit sur le fonctionnement des commissions administratives spéciales, les CIMM, les compétences de chaque acteur, les critères d’inscription sur les listes. Les problèmes rencontrés sur l’établissement des listes provinciales n’étant pas entièrement réglés, il convient d’en débattre puisqu’il existe un lien de nature et d’opportunité et cela malgré nous entre les deux corps électoraux. Enfin la question de la facilitation des procédures d’inscription des natifs de Nouvelle Calédonie sur la liste électorale référendaire doit être réglée, notre délégation n’est pas opposée à un débat sur ce point d’achoppement ou tout et son contraire a été dit ces derniers temps.


Monsieur le Premier ministre, c’est dans cet état d’esprit et dans une démarche globale et volontariste que ma délégation participera activement aux travaux de ce comité des signataires extraordinaire.


Je vous remercie

Mr Roch WAMYTAN, Président du groupe UC FLNKS et Nationalistes

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24 octobre 2014 5 24 /10 /octobre /2014 18:46

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19 mai 2014 1 19 /05 /mai /2014 08:30
Discours : Caribbean Regional Seminar 2015 Special Committee on decolonization United Nations Managua, Nicaragua 19-21 May 2015

M. Roch Wamytan

President of the UC-FLNKS and Nationalists Group
at the Congress of New Caledonia

Monsieur le Président du Comité spécial de décolonisation,
Mesdames et Messieurs les membres du Comité spécial de décolonisation,
Mesdames et Messieurs les représentants des territoires non autonomes,
Mesdames et Messieurs,


Permettez-moi tout d’abord de remercier chaleureusement le gouvernement et le peuple du Nicaragua pour l’accueil chaleureux qui nous est fait à l’occasion de ce séminaire régional des Caraïbes. Je voudrais aussi saluer spécialement le président de la république Daniel Ortega dont la renommée dépasse de loin les frontières de son propre pays. En effet l’histoire de son pays et de ses habitants, liée profondément à la révolution sandiniste, nous est parvenue à nous aussi peuple océanien mélanésien de l’autre rive du pacifique à la recherche de notre destin.
Je voudrais de même remercier les membres du comité spécial des 24 ainsi que son président Mr Xavier Lasso Mendoza pour l’invitation qui m’a été faite, à participer à ce séminaire en tant qu’expert exerçant depuis mai 2014 la présidence d’un groupe politique indépendantiste, le groupe UC-FLNKS et Nationalistes, au sein du congrès, assemblée délibérante du territoire non autonome de la Nouvelle Calédonie.


Introduction
Comme l’indique le document A/AC.109/2015/17 de l’Assemblée générale de février 2015, ce séminaire a pour objet de permettre au Comité spécial de recueillir les points de vue des représentants des territoires non autonomes, d’experts, de membres de la société civile et d’autres parties prenantes au processus de décolonisation, qui pourraient l’aider à déterminer les politiques et les modalités pratiques susceptibles d’être retenues dans le processus de décolonisation des Nations Unies. Les débats prévus dans le cadre du séminaire permettront au Comité spécial d’analyser et d’évaluer, de façon réaliste et au cas par cas, la situation dans les territoires non autonomes ainsi que les moyens par lesquels le système des Nations Unies et l’ensemble de la communauté internationale pourraient améliorer les programmes d’assistance aux territoires. Ainsi les contributions des participants serviront de base aux débats que le Comité spécial tiendra à sa session de fond, qui aura lieu à New York en juin 2015, en vue de soumettre à l’Assemblée générale des propositions concernant la réalisation des objectifs de la troisième Décennie internationale de l’élimination du colonialisme.
Le thème proposé pour ce séminaire avec l’ordre du jour correspondant est : « la mise en œuvre de la troisième Décennie internationale de l’élimination du colonialisme: les 70 ans de l’Organisation des Nations Unies: bilan du programme de décolonisation».
En tant qu’acteur et observateur de la vie politique et institutionnelle de la Nouvelle Calédonie depuis ces trente dernières années, je vais m’en tenir au chapitre IV en chiffre romain, paragraphe 2, petit a, du document de l’assemblée générale précité c’est-à-dire le point de vue d’un responsable politique originaire des « territoires non autonomes de la région du pacifique » et plus particulièrement de la Nouvelle Calédonie, exerçant les fonctions de membre de l’assemblée délibérante depuis 1989, mais ayant aussi été président de cette institution entre 2011 et 2014 de même que vice-président et président de notre mouvement de libération, le Front de libération nationale kanak et socialiste ,le FLNKS entre 1990 et 2001. Ce fut d’ailleurs en tant que président du FLNKS que je signai l’accord de Nouméa en 1998, un accord tripartite entre le gouvernement français, la représentation locale des non indépendantistes et le FLNKS représentant le peuple kanak colonisé à majorité indépendantiste. Je ne doute pas que mes propos pourraient susciter la réflexion pour les territoires non autonomes des Caraïbes et des autres régions. Le point de vue critique que je vais soumettre aux débats du séminaire portera essentiellement sur le chapitre IV en chiffre romain, paragraphe 1, point petit a,b,c et d. du document de l’assemblée générale précité précisant notamment le rôle de la puissance administrante française dans la mise en œuvre des principes et recommandations des Nations Unies concernant la décolonisation du territoire non autonome de la Nouvelle Calédonie dans le cadre de la troisième décennie internationale de l’élimination du colonialisme, 2011-2020. Je vais me concentrer plus particulièrement sur le rôle de la France, puissance administrante dans le processus de décolonisation de la Nouvelle Calédonie. Je n’aborderai pas la construction de l’autonomie du pays, déjà développée par le vice-président du gouvernement de la Nouvelle Calédonie hier après-midi. De même je laisserai le soin à Michaël Forrest de préciser dans la discussion la part du FLNKS dans l’avancée de l’autonomie du pays.


Bref rappel historique
La Nouvelle Calédonie est réinscrite sur la liste des territoires non autonomes de l’ONU depuis 1986. En 1988 ont été signés avec la puissance administrante et les forces non indépendantistes locales, les accords dits de Matignon et Oudinot. En 1998 est signé l’accord de Nouméa pour une période courant de 1999 à 2014 année d’un possible déclenchement du référendum d’autodétermination, sous réserve que le Congrés, assemblée délibérante du pays, à l’issue des élections générales de mai 2014 le décide à une majorité des 3/5ième des conseillers soit 33 sur 54 membres de l’assemblée. Comme ce ne fut pas le cas, l’Etat Français est tenu d’organiser le référendum d’autodétermination dénommé consultation référendaire dans l’accord de Nouméa en 2018. Si le résultat est négatif, un second référendum aura lieu en 2020 et un troisième en 2022.


Dans la suite de longues et difficiles luttes de revendication jalonnant l’histoire du peuple kanak depuis la prise de possession par la France en 1853, l’accord de Nouméa en 1998 a fixé le calendrier dans lequel les mesures de rééquilibrage, maitre mots des accords politiques de 1988 et 1998, allaient être finalisées pour donner corps au processus de décolonisation et d’émancipation devant déboucher sur l’acte d’autodétermination. La période 2018-2022 doit en principe voir le pays accéder par référendum à son indépendance après une longue période de maturité depuis le premier accord politique dit de Nainvilles les roches en 1983. On peut constater d’ailleurs que le calendrier de ce processus cadre parfaitement avec celui de la troisième décennie pour l’éradication du colonialisme fixé par les Nations Unies : 2011-2020.


La puissance administrante dans le processus de décolonisation
Il est donc intéressant et utile d’analyser la politique de la puissance administrante française en Nouvelle Calédonie dans le cadre de ces deux schémas qui s’imposent à elle. D’une part dans la mise en œuvre de la troisième décennie de l’éradication du colonialisme en tant que puissance souveraine administrant le territoire non autonome de la Nouvelle Calédonie et notamment le chapitre IV, paragraphe 1 points petit a,b,c et d de l’ordre du jour (acte authentique d’autodétermination en toute liberté, information sur les statuts politiques à venir, initiative politique devant être à l’abri de toute intimidation et sans ingérence extérieure, campagne d’information politique adaptée et impartiale à mener). D’autre part pour le second schéma, dans le rôle de la puissance administrante au niveau de la mise en application des dispositions de l’accord de Nouméa et notamment la préparation de l’acte d’autodétermination de 2018. Il convient de rappeler d’ailleurs que la France est signataire de cet accord qui relève aussi bien de sa politique interne, qu’externe puisque la Nouvelle Calédonie fait partie de la liste ONU des territoires non autonomes et qu’une des dispositions de cet accord précise que le processus d’émancipation sera porté à la connaissance de l’ONU.
Il convient ainsi de considérer dans quelle mesure la puissance administrante respecte ses engagements nationaux et internationaux en ce qui concerne le processus de décolonisation de la Nouvelle Calédonie. Prépare-t-elle ce Territoire non autonome à sa décolonisation et à un acte d’autodétermination pleinement libre, transparent et donc acceptable ou met-elle en place toutes les conditions pour que ce Territoire non autonome demeure au sein de son ensemble ultramarin au nom des intérêts supérieurs de la nation et de sa place dans le monde ? Joue-t-elle franc jeu dans la mise en œuvre du processus de décolonisation et d’émancipation ou pose-t-elle des obstacles permanents freinant ce processus ?

Les Obstacles et freins au processus de décolonisation ou : Ligne rouge de l’indépendance interdite
Il s’agit là de questions tout à fait légitimes que peut se poser tout militant de la cause indépendantiste lorsque l’on entend les discours des plus hauts responsables politiques français ou que l’on constate les systèmes mis en place pour contrer les velléités d’indépendance de certains peuples colonisés. Car il faut bien constater une chose rappelée dans les interventions d’hier et notamment celle de Serguei, Cherniasky, notant qu’ avec la situation internationale qui s’est détériorée entrainant le chaos dans les relations internationales, ajouter à cela la montée du terrorisme depuis le 11 septembre 2001, la mentalité coloniale des anciennes puissances a ressurgie sous des formes plus ou moins rampantes, pour continuer à conforter leur domination coloniale. Et cela complique le travail du C24 et impacte les territoires non autonomes dans leur lutte d’émancipation. La Nouvelle Calédonie n’échappe pas à cette nouvelle donne.


S’agissant ainsi des territoires ultramarins français, le Président français François Hollande lors de sa tournée des « dernières colonies » françaises avait une constante dans ses discours : «La France est présente de partout dans le monde, un pays où le soleil ne se couche jamais, la France est un pays d’Océanie, de l’Océan indien, de l’Amérique, de l’Atlantique, des Caraïbes ». Mais dans l’Océan pacifique, la France a refusé que la Polynésie Française soit sur la liste des pays à décoloniser, dans l’Océan indien la partition des Comores a été réalisée avec une occupation de Mayotte jugée illégale au regard du droit international. Dans l’Océan atlantique et les Caraïbes les « veilles colonies » restent département français à statut inchangé, il n’y a pas de consultation sur une possible indépendance mais les transferts de population vers la France métropolitaine sont importantes. Parfois sous couvert de démocratie, nous pouvons déceler des manœuvres d’un Etat tentant d’assurer sa domination tout en faisant bonne figure devant la communauté internationale.


Les responsables indépendantistes que nous sommes avons quoi d’être inquiets au vu de cette situation en outre-mer français et eu égard aux déclarations de certains responsables politiques français de haut niveau à l’instar du président François Hollande lors de son dernier voyage en Nouvelle Calédonie en novembre 2014 affirmant dans son discours au centre Culturel Tjibaou que les intérêts supérieurs de la France se situent aussi dans le pacifique.
La question qui se pose alors est de savoir si la France peut défendre seule ses intérêts dans le pacifique ou a-t-elle besoin nécessairement de ses trois territoires ultramarins dont la Nouvelle Calédonie et la Polynésie Française inscrits tout deux sur la liste ONU des territoires non autonomes et de Wallis et Futuna collectivité française du pacifique non-inscrite sur la liste ONU ? La réponse est donnée par la politique française menée à l’heure actuelle, c’est à dire se servir de ses territoires ultramarins du pacifique comme cheval de Troie ou de « faire valoir » de sa présence dans cette zone Asie-Pacifique que le président américain Barak OBAMA qualifiait récemment de « nouveau centre de la croissance mondiale ». Cela sans compter par ailleurs ce que les superficies de ces trois territoires peuvent apporter à la puissance administrante en terme de superficie de la zone économique exclusive, la portant tout simplement au second rang de puissance maritime mondiale. Quel pays puissant dans le monde actuel refuserait ou ferait la fine bouche devant une telle aubaine de disposer de territoires sous forme de porte-avions dans une zone passée de zone oubliée à zone de la croissance mondiale.


a)- Les moyens mis en œuvre pour freiner le processus de décolonisation : moyens sentimentaux
L’histoire des décolonisations nous a appris en conséquence que lorsqu’un Etat colonisateur souhaite absolument garder des territoires colonisés au nom de ses intérêts supérieurs, il décrète l’indépendance comme ligne rouge interdite et il y met les moyens. Il tente tout d’abord d’amadouer le peuple en le prenant par les sentiments : la France nourricière, patrie des droits de l’homme, la mère patrie protectrice de ses enfants dans un monde de plus en plus difficile et cruel, la France porteuse des valeurs républicaines qui éclairent les peuples, la France attachée définitivement à ses territoires par des liens de sang, celui versé par les soldats kanak sur les fronts européens durant les deux conflits mondiaux. La grande guerre de 14-18 est souvent rappelée en cette année du centenaire. Cette guerre qui a vu plus de 1000 soldats kanak combattre en France ou dans les Dardanelles, 380 ne sont jamais revenus. Même scénario durant la seconde guerre mondiale de 39-45. Encore le même scénario en ce moment ou des centaines de jeunes kanak sont engagés sur les théâtres d’opérations extérieures où se trouvent impliquées les forces armées françaises : Liban, Afrique, Bosnie, Kosovo,Afghanistan, certains y ont aussi laissés leur vie.


b)-Moyens technique, financier.
A côté de ces moyens sentimentaux, la puissance administrante agit sur le registre technique et financier pour rendre ces territoires complétement dépendants des subsides métropolitains et européens. Une masse d’argent est transférée par l’Etat pour la prise en charge des compétences de souveraineté, avec le paiement des salaires des fonctionnaires d’Etat qui sont pratiquement doublés par rapport au salaire de la métropole. Par ailleurs l’aide à certains secteurs dont le logement social et autres investissement productifs au pays via des fonds métropolitains défiscalisés vient gonfler exagérément ces transferts. Cela donne une conséquence pouvant se résumer ainsi : trop d’argent, mal réparti (25% de la population vit au-dessous du seuil de pauvreté) et in fine un pays où tout est chère, vivant sous perfusion permanente devenant pratiquement incapable d’assurer son autonomie financière sans l’aide de la puissance administrante, à moins de réformes drastiques dont a parlé le vice-président du gouvernement hier.


c)- moyens inavouables
Enfin l’utilisation des moyens inavouables sur lesquels toute une littérature existe, je veux parler des manœuvres de déstabilisation et de l’immigration ou la transmigration de ses ressortissants nationaux vers les territoires ultramarins fussent-ils ou non sur la liste des pays à décoloniser.


Manœuvre, déstabilisation

Les peuples qui ont été colonisés et ceux qui demeurent encore sous tutelle coloniale connaissent bien ou ont appris à les connaitre ces manœuvres de déstabilisation mettant en œuvre un principe vieux comme le monde du : « diviser pour régner ». L’ouvrage de stratégie militaire « l’art de la guerre » du chinois « Sun TZU » ou de son vrai nom « SUN UN au 6ième siècle avant JC en parlait déjà. Les instruments de domination coloniale sont ainsi identifiés : déstabilisation, tension, et la peur. Cette peur que présentait hier dans son exposé Mr Daniel Manfred Malcolm en parlant d’elle comme l’ennemie implacable des leaders anti colonialistes et des peuples colonisés.


Le FLNKS, notre mouvement de libération nationale, le peuple kanak, ainsi que tous ses alliés indépendantistes, de même d’ailleurs que les non indépendantistes subissent et doivent faire face, depuis des décennies, à ces types de stratégies en Nouvelle Calédonie. Récemment encore le mouvement indépendantiste a subi des tentatives de division qui ne sont que des manœuvres supplémentaires parmi toutes celles déjà subies en plus des assassinats de leurs leaders. En effet, combien de nos leaders ont été assassinés pour que le processus de décolonisation soit enrayé et que notre pays n’accède jamais l’indépendance ? Combien de nos leaders ont été sujets à des éliminations politiques, des pressions et des tentatives de retournement et de corruption

Nous sommes parfaitement conscients que ces stratégies existent et nous savons identifier les commanditaires derrière les petites mains à la manœuvre ou au-delà des propos lénifiant de certains responsables affirmant que l’Etat est un arbitre impartial et équidistant et qu’in fine ce seront les calédoniens qui décideront de leur destin par référendum. Les partis de droite s’y mettent aussi en cherchant à faire croire que l’Etat « dit socialiste » comme ils le prétendent est pour l’indépendance, alors que tous ne servent qu’un seul et même objectif : maintenir la ligne rouge de l’indépendance interdite.


L’immigration
L’autre moyen de défendre les intérêts supérieurs de la nation est par le moyen démocratique, un homme, une voix et si la balance est en faveur du peuple colonisé, quoi de plus simple que de faire venir du monde de France et leur donner le droit de vote. L’histoire de la Nouvelle Calédonie est une longue histoire de flux de migrations organisés par la puissance administrante. Ce flux en provenance de la Métropole s’est accéléré avec l’irruption des kanak sur la scène politique locale entre 1953 et 1956 au moment où ils obtenaient le droit de vote et donc à terme de pouvoir s’autodéterminer librement. A l’indépendance de l’Algérie en 1962, le général De Gaulle ne sachant quoi en faire du million de réfugiés français a facilité leur installation en Guyane et en Nouvelle Calédonie où disait-il n’y avait rien et que tout était à faire. Ainsi toute initiative est bonne et justifiée pour favoriser l’implantation de populations extérieures afin de noyer le peuple kanak démographiquement et d’empêcher l’indépendance du pays. Dans ce contexte, la « démocratie », entre autres, par le vote devient une arme mortelle contre le peuple colonisé.


Les stratégies de colonie de peuplement et de partition de pays sont ainsi bien connues car elles ont été expérimentées en Algérie dans les années cinquante et au Vanuatu (ex Nouvelles Hébrides) à la fin des années soixante-dix. Elles ont échouées dans ces deux ex colonies. En revanche, elles ont réussi aux îles Comores avec l’île de Mayotte et le contentieux avec la France est toujours en cours. Ainsi, on peut se demander si en Nouvelle-Calédonie, en plus de la colonie de peuplement, la partition, malgré son interdiction dans l’Accord de Nouméa, n’est pas un « plan bis » au travers des projets de « fédéralisme interne ».
A partir de la situation actuelle on peut faire l’hypothèse d’un montage en cours par le biais de manœuvres de division entre la « province Nord » et la « province Sud ». Une des manœuvres étant, à l’aube de la fin de l’Accord de Nouméa, de provoquer des conflits, des confrontations violentes. A titre de rappel, un des scénarios prévu par Alain Christnacht, l’un des négociateurs de l’Etat français au moment des discussions en 1998 était, dans ce cas, la reprise en main par l’Etat. A l’approche de la sortie de l’accord de Nouméa des tentatives de déstabilisation ne sont pas à exclure en Nouvelle Calédonie. Ce serait des remakes comme cela s’est passé aux Comores, avec le barbouzard français Bob Denard pour favoriser la partition de ce nouveau territoire indépendant. Ou encore la mission de la DGSE (service secret français) en opération commanditée par le ministre de la défense Eugène Hernu en 1985, aboutissant à l’explosion du Rainbow Warrior en Nouvelle Zélande, navire amiral de l’organisation écologiste Green Peace prêt à appareiller pour l’atoll de Mururoa afin de protester contre les essais nucléaires français.


c)-Modèle de la France Afrique
Par ailleurs dans le cadre de la préparation du référendum d’autodétermination qui doit se tenir à partir de 2018, la puissance administrante, suivant en cela les principes de l’ONU et les dispositions de l’accord de Nouméa, prépare la question qui sera posée à la population. Cette question portera sur le transfert des compétences régaliennes (ordre public et sécurité, justice, monnaie et crédit, relations extérieures et défense, la citoyenneté et la nationalité). Pour cela, en fonction d’une décision prise par le comité des signataires de l’accord de Nouméa en octobre 2014 à Paris, la puissance administrative organise des comités de pilotage thématiques en Nouvelle Calédonie. Dans ce cadre, les indépendantistes ont souhaité que des experts des Nations Unies puissent venir aider à la réflexion sur l’exercice de ces compétences dites régaliennes.


A ce stade, nous ne recevons que des missionnaires français qui nous orientent vers la mise en place d’un système calqué sur le modèle de celui de la Françafrique. Pour seul exemple, je citerai la proposition des missionnaires de l’Etat durant le Comité de pilotage « Monnaie et crédit » retenant parmi 4 options de monnaie nationale, leur option préférentielle du système du Franc CFA. Faut-il rappeler que beaucoup d’experts et spécialistes de l’Afrique dénonce ce système et l’accuse d’être responsable de l’appauvrissement de l’Afrique. Comment la puissance administrante peut-elle prétendre être équidistante alors qu’elle souhaite garder la mainmise sur les compétences régaliennes en instaurant un système de type Françafrique organisant des faux transferts ou des compétences soit disant partagées. Ce système aboutit dans tous les cas à de fausses indépendances. Le projet défendu par les indépendantistes est celui d’un pays totalement indépendant et souverain qui se construira en interdépendance dans sa région Asie pacifique, au moyen d’outils créés à cette effet comme le Groupe du Fer de Lance Mélanésien. Nous avons par ailleurs de jeunes kanak et calédoniens diplômés, des spécialistes expérimentés, qui réfléchissent à ces questions et sont loin de favoriser un système du copier-coller qui a montré ses limites.


d)-Le droit de vote, les critères et les listes électorales
Il s’agit d’un problème fondamental puisque certains parlent de la bataille sur le corps électoral comme la mère des batailles, permettant l’exercice du droit à l’autodétermination des peuples colonisés. Les puissances coloniales ont joué et rejoué sur cette problématique au gré de leurs intérêts. En Nouvelle Calédonie il s’agit d’un problème récurrent depuis que le droit de vote a été accordé au peuple colonisé en 1953. Les différents accords politiques de 1983, 1988 et 1998 ont buté sur cette question du corps électoral qui a d’ailleurs été une des causes de l’assassinat de Jean Marie Tjibaou. A l’approche du référendum d’autodétermination de 2018, cette question n’a pas manqué de ressurgir avec les mêmes manœuvres servies et resservies depuis 60 ans. D’où les démarches effectuées par le FLNKS auprès du C24 depuis le séminaire régional de 2013 en Equateur dans l’objectif d’informer le comité sur l’évolution de la situation. C’est d’ailleurs sur cette problématique que les membres du comité ont effectué la mission de visite en Nouvelle Calédonie dans le courant du mois de mars 2014. Ce dossier divise la Nouvelle Calédonie à l’approche de la sortie de l’accord de Nouméa et il nous semble encore une fois que la puissance administrante, compétente en droit électoral, se déresponsabilise en renvoyant l’issue des problèmes à l’appareil judiciaire ou à une solution politique consensuelle, à charge aux indépendantistes et non indépendantistes de la trouver entre eux.


C’est ainsi que suite au comité des signataires d’octobre 2014 à Paris, il a été décidé d’opérer une modification de la loi organique de1999 devant porter sur la composition des commissions administratives spéciales chargées de l’établissement et de la révision des listes électorales spéciales pour les élections provinciales et pour la consultation sur l’accession du pays à la pleine souveraineté, ainsi que sur la consultation elle-même. Après l’examen de l’avant-projet par le Congrès et suite à un rejet du texte par la majorité non indépendantiste, il a été décidé de tenir un comité des signataires extraordinaire à Paris le 5 juin prochain pour tenter de trouver un compromis politique. Le nœud du problème réside dans l’inscription sur la liste référendaire de tous les natifs de Nouvelle Calédonie en plus des kanak de statut coutumier et des personnes ayant participé au référendum de ratification de l’accord de Nouméa en 1998 qui seraient inscrits d’office. Les non indépendantistes souhaitent inscrire tous les natifs, pour sa part, le FLNKS souhaite s’en tenir qu’aux deux catégories de personnes citées : celles de statut coutumier et celles de la liste référendaire de ratification de 1998.
Le Congrès de la Nouvelle-Calédonie, dont les élus sont majoritairement non-indépendantistes, a émis un avis défavorable sur cette proposition de modification de la loi organique.
Au cœur de cet avis défavorable se trouvent deux points clef pour les non-indépendantistes, à savoir les inscriptions automatiques sur la liste spéciale pour la consultation sur l’accession du pays à la pleine souveraineté, et la demande de modification de l’article 188 de la loi organique qui définit le corps électoral pour les élections provinciales, base de la notion de citoyenneté calédonienne.


Le projet de modification de la loi organique en l’état actuel ne prévoit que l’inscription automatique sur la liste électorale pour la consultation des électeurs de statut civil coutumier, qui sont donc tous kanak, et celle des électeurs ayant participé à la consultation du 8 novembre 1998 approuvant l’Accord de Nouméa. Les autres catégories d’électeurs doivent faire une démarche individuelle pour être inscrits sur cette liste et peuvent voter s’ils remplissent les conditions requises à l’article 218 de la loi organique.


Comme rappelé ci-dessus, les partis non-indépendantistes réclament l’inscription automatique de tous les natifs de Nouvelle-Calédonie. Le Groupe UC-FLNKS et Nationalistes s’oppose à cette demande car l’inscription automatique de tous les natifs reviendrait à inscrire automatiquement pour cette consultation d’autodétermination toutes les personnes issues de la colonie de peuplement. Rappelons que l’Etat français a fait de la Nouvelle-Calédonie une colonie de peuplement dans le but de rendre les Kanak minoritaires dans leur propre pays. Rappelons aussi que le peuple kanak, seul peuple autochtone et colonisé de Nouvelle-Calédonie, réclame un référendum d’autodétermination depuis qu’il revendique l’indépendance, c’est-à-dire depuis 40ans. A cette date le peuple kanak n’était pas encore complètement submergé par l’immigration en provenance essentiellement de la Métropole.
Accepter aujourd’hui l’automaticité sans garde fous, équivaut à se jeter dans un piège de plus afin de rendre « démocratiquement » les Kanak minoritaires, l’automaticité ayant pour but, entre autre de masquer les fraudes d’inscriptions sur les listes électorales et ce dans la droite ligne des fraudes lors de l’établissement et de la révision des listes électorales provinciales, que nous avons dénoncé devant les instances de l’ONU à plusieurs reprises., L’alibi de l’automaticité justifié par le fait que le temps presse n’est pas acceptable car c’est une manœuvre voulue alors même que ces listes se devaient d’être mises en route dès la signature de l’Accord de Nouméa en 1998 il y a 17 ans !


Profitant de la venue sur le territoire d’une mission de l’Assemblée nationale menée par son président Claude Bartolone, les partis politiques non-indépendantistes ont manifesté devant le Haut-commissariat de la République française en Nouvelle-Calédonie, le vendredi 24 avril 2015, pour « réaffirmer leur volonté de rester français, dire « non à l’indépendance » » et exiger l’inscription automatique de tous les natifs sur la liste spéciale pour la consultation. Suite à cette manifestation, le gouvernement français a proposé la tenue d’un Comité des signataires extraordinaire le 5 mai 2015 à Paris dont l’ordre du jour porterait uniquement sur l’inscription automatique des natifs.


Dans plusieurs communiqués (datés du 22 et 27 avril et du 5 mai) que nous avons également transmis au secrétariat du comité, notre groupe politique a donné ses positions sur la question de l’inscription automatique et sur le Comité des signataires extraordinaire. Ses positions politiques sont celles que nous avons précédemment exprimées lors des commissions et de la séance publique du Congrès sur le projet de modification de la loi organique, en mars dernier.


Sur l’inscription automatique pour la consultation sur l’accession du pays à la pleine souveraineté : le Groupe UC-FLNKS et Nationalistes souhaite que, seules les personnes ayant ou ayant eu le statut coutumier, de même que les électeurs ayant participé à la consultation du 8 novembre 1998 approuvant l’Accord de Nouméa, puissent être inscrits automatiquement. Nous considérons en effet qu’il existe un contentieux et des fraudes sur la composition actuelle de la liste spéciale des élections provinciales et que, de ce fait, l’inscription automatique de tous les natifs n’est pas envisageable, et que celle des natifs, sur la base de leur inscription sur la liste spéciale pour les élections provinciales, est hautement problématique du fait du contentieux susmentionné. Notre position est simplement d’exiger le respect et l’application des critères des corps électoraux pour l’établissement des listes électorales spéciales, par tous les partenaires de l’Accord de Nouméa, y compris l’Etat qui de son côté doit s’engager à définir le périmètre de ce qu’on désigne par centre des intérêts matériels et moraux désigné par CIMM
Nous affirmons ne pas être opposés au principe d’un Comité des signataires extraordinaire, à condition que l’ordre du jour porte également sur l’établissement sincère (c’est-à-dire le « toilettage ») de la liste spéciale pour les élections provinciales et, de plus, nous avons demandé au représentant de l’Etat en Nouvelle-Calédonie qu’il soit de même traité de l’implication du Comité de décolonisation de l’ONU dans l’organisation de la consultation sur l’accession du pays à la pleine souveraineté. Nous avons souligné au de l’Etat que notre participation au Comité des signataires extraordinaire aura pour but de réaffirmer et faire valoir nos positions. De plus, nous renvoyons l’Etat face à ses propres responsabilités qui ont abouties aux dérives que nous subissons et qui opposent actuellement les Calédoniens sur ces questions. N’oublions pas que l’Etat seul est souverain s’agissant des élections et de la législation régissant l’établissement des listes électorales.

L’histoire des décolonisations a montré la nécessaire vigilance dont nous devons faire preuve lorsqu’on voit ce dont a été capable le système colonial par rapport au droit de vote et aux élections : exclusion des indigènes du droit de vote, double collège, colonie de peuplement, vrais faux référendum coloniaux, trucage des listes, etc. C’est avec tout cela en tête que le mouvement indépendantiste ira défendre ses positions à Paris.
Tout ce qui s’est passé autour de la question des listes électorales et de la loi organique n’est qu’une preuve de plus que seul l’Etat est réellement décideur lorsqu’il est question d’enjeux aussi cruciaux pour l’avenir de notre pays. En effet, il est difficile de comprendre qu'au 21ème siècle des hommes et des femmes, citoyens de leur pays, par rapport à leur avenir institutionnel, ne possèdent que le pouvoir de donner un avis sur des textes non préparés par eux et dont la décision va, une fois de plus, dépendre de parlementaires, qui ne sont pas citoyens de la Nouvelle-Calédonie, ne vivent pas ici, et ne connaissent pas notre pays. Cela porte le nom de « colonisation » et ce mode de gouvernance facilite les fraudes et multiplie les obstacles sur le processus de décolonisation.


Conclusion
A l’issue de cette analyse, j’ai tenté de démontrer qu’au-delà du vernis démocratique se cachent des pratiques expérimentées de tout temps par les puissances coloniales pour assurer leur domination au nom des intérêts supérieurs de leurs nations respectives. Notre puissance coloniale ou puissance administrante, la France, n’échappe pas à ces genres de pratiques, comme s’il s’agit d’une malédiction qui frappe ces grandes puissances vis-à-vis des peuples qu’elles ont colonisés. Il y a en cela quelque chose d’effrayant ! Mais restons optimistes car peut-être un jour des chercheurs trouveront la solution à l’instar du grand économiste français Thomas Piketty qui vient de révolutionner la compréhension de l’inégalité en démontrant dans son dernier ouvrage « le Capital au XXIème siècle » que : « l’évolution historique de l’accumulation du capital conduisait à l’enrichissement exagéré de ceux qui sont déjà riches ». Paradoxalement la London School of économics, l’école de l’establishment du capitalisme mondial vient de l’accueillir comme professeur à mi-temps !


Que faire alors Monsieur le président pour fermer définitivement cette parenthèse de l’histoire qu’est le colonialisme? Changer l’attitude de ces grandes puissances ou les mécanismes qui conduisent à de telles attitudes est horriblement difficile, il nous reste alors l’ONU et comme le disait le représentant de l’Algérie hier, l’ONU demeure le seul refuge pour les peuples colonisés. Nous partageons donc entièrement les propositions qui ont été faites depuis hier et en ce qui nous concerne, la mise en œuvre des recommandations de la mission de visite du C24 l’an dernier en Nouvelle Calédonie. Ces recommandations doivent constituer notre feuille de route. Il conviendra de pérenniser ces visites dans les territoires autonomes afin de sensibiliser les populations sur les possibilités offertes par l’ONU et les aider à exorciser cette peur entretenue à petit feu par les forces coloniales. Par ailleurs l’idée de mette en place un sous-comité par territoire est nécessaire à plus d’un titre. De même l’envoi d’experts de l’ONU et une grande implication du C24 pour aider la Nouvelle Calédonie à réfléchir sur le transfert des compétences régaliennes dans le cadre de la préparation du référendum, nous semble capital dans le processus de décolonisation en cours. Bien évidemment un dialogue permanent et constructif avec la puissance administrante reste un passage obligé. Je vous remercie.
Convention Center, Holiday Inn, Managua, Nicaragua, mercredi 20 mai 2015 15h30

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22 février 2014 6 22 /02 /février /2014 16:38

sourcesdudroit2.gifLa problématique centrale reste la question de l’octroi du vote aux Kanak qui a fait l’objet de multiples applications allant d’une interdiction complète à un suffrage capacitaire, avant l’accession à la citoyenneté. Le poids démographique du peuple premier est l’occasion pour le droit français de revenir sur un des fondements de sa propre organisation constitutionnelle, avec l’instauration d’un double collège électoral, de l’élargissement aux populations kanak de ce droit de vote, et sous la double pression d’une immigration massive, et des événements politiques du début des années, d’un corps électoral gelé.

            Si ce dernier aspect de la problématique qui nous occupe peut être perçu comme une atteinte à l’égalité des citoyens devant le suffrage universel, le maintien d’une certaine cohésion au sein d’une République qui ne fait pas de distinction entre les ethnies en son sein amène celle-ci à s’extirper de ses grands principes. 

La question du droit de vote du peuple kanak (A) a évolué de la revendication d’un droit de suffrage exclusivement kanak (B) à un droit de vote ouvert aux « victimes de l’histoire » (C) puis à un droit de vote sous condition d’une durée de résidence (D) vers une citoyenneté locale( E).

 A-              La question de l’octroi du droit de vote au peuple kanak 

Le peuple  kanak et le droit de vote : la genèse de sa mise en minorité

            Historiquement, le déni au peuple kanak du droit de vote était traduit à « l’époque coloniale par l’exclusion de la qualité de citoyen ». La Constitution de 1946 proclame plus tard qu’elle « écarte tout système de colonisation fondé sur l’arbitraire » et « garantit à tous l’égal accès aux fonctions publiques et l’exercice individuel ou collectif des droits et libertés », tels que « proclamés par la Déclaration des Droits de l’Homme de 1789 et le préambule de la Constitution de 1946 ». Enfin, l’article 80 de cette Constitution disposait par ailleurs : « Tous les ressortissants des territoires d’outre-mer ont la qualité de citoyen », ce que l’article 82 prolongeait en soulignant «  les droits et libertés attachés à la qualité de citoyen français ».

 2- L’exemple des commissions municipales et le droit de vote kanak

            Les commissions municipales furent créées « entre autres à Païta et à Canala, qui précédèrent l’installation du premier véritable statut communal de Nouméa ». Les règles générales relatives à ces commissions ont été posées par l’arrêté gubernatorial n° 383 du 7 avril 1888, et par l’arrêté n° 401 du même jour ; et les circonscriptions « correspondaient, en  général, à une localisation faible et éparse de la colonisation européenne ».

Mais la composition de ces commissions municipales est fixée d’une telle manière qu’on n’y trouve aucun représentant du peuple premier kanak, leur mise à l’écart étant juridiquement prévue. Ainsi, deux dispositions de l’arrêté n°401 du 7 avril 1888 indiquent « qu’il n’est nullement question de faire participer la population autochtone. En premier lieu, l’article 12 énonce que la liste des électeurs contient « le nom, domicile et qualification de chacun des inscrits ce qui suffit à éliminer les canaques puisqu’il n’y a pas d’état civil à leur intention… ». En second lieu, l’article 2 prévoit notamment que  « …l’élection des membres de la commission municipale a lieu (…) sur les listes dressées pour l’élection du conseil général », ce qui écarte toute possibilité pour le peuple premier kanak d’y être représenté.

Pourtant si l’impossibilité juridique de la représentation des populations kanak au sein des commissions municipales est réelle, tel n’est pas le cas des étrangers puisque la commission municipale comprenait « trois membres élus pour deux ans par un collège électoral dans lequel les étrangers étaient admis comme les citoyens français ».

Il en résulte ainsi que, tant en droit que dans les faits, il existait dès la mise en œuvre des mesures réglementaires relatives au découpage géographique en circonscriptions communales de la Nouvelle-Calédonie une coexistence des deux sociétés dont  les tentatives  d’adhérer aux mêmes objectifs ne vont être éprouvées qu’à la fin des années 80.

            Aussi, il fallut attendre « la loi-cadre du 23 juin 1956 dite loi Defferre pour que la démocratisation, notamment en termes de représentation électorale, soit réalisée dans les outre-mers » ; avec le décret d’application du 22 juillet 1957 qui va permettre à  la Nouvelle-Calédonie d’être représentée au Parlement de la République par deux députés et un sénateur.

3-Les débuts de la mise en minorité du peuple kanak          

            La Constitution de la Ve  République a été approuvée par référendum en Nouvelle-Calédonie par 98 % des suffrages exprimés à une époque où les Kanak étaient majoritaires en voix ; mais pas au sein des institutions des collectivités en raison du double collège ; la seule perspective pour la Nouvelle-Calédonie était « une autonomie croissante ».

            Mais en réalité, les années soixante marquent le point de départ du processus de minorisation électorale dans lequel est installé le peuple premier kanak depuis cette époque en raison de plusieurs facteurs.

            En premier lieu, « l’État reprend peu à peu de nombreuses compétences, et l’on s’éloigne de plus en plus de l’autonomie » ; et en second lieu, un « basculement historique  qui rend les Kanak minoritaires dans leur pays, situation acquise avec l’afflux de non-Calédoniens attirés en Nouvelle-Calédonie par ce qu’on a appelé le boum du nickel ». Ainsi « au moment même où la politique centralisatrice du Gouvernement de la République inquiète les Kanak soucieux d’avoir le pouvoir de conserver leur identité », ceux-ci sont plongés « dans une situation  où ils vont se trouver privés du moyen d’expression essentiel dans la démocratie qui les inclut désormais ; leur poids électoral est devenu insuffisant pour déterminer une majorité décisionnelle ». En d’autres termes, lorsque le peuple premier kanak est admis par la Constitution de 1946, après en avoir été écarté pendant près d’un siècle, à l’égalité républicaine, les Kanak  « ne tardent pas à s’en voir priver le bénéfice par l’affaiblissement du poids de leur suffrage par rapport aux autres communautés installées en Nouvelle-Calédonie ».

            Aussi,  si « certains se demandent par quel mystère la Nouvelle-Calédonie n’a pas, comme la plupart des possessions d’outre-mer de la France, accédé à l’indépendance par les voies naturelles de l’autodétermination… », c’est qu’ils oublient « cette particularité unique dans les colonisations françaises : en Nouvelle-Calédonie, les autochtones sont devenus minoritaires chez-eux ».

            Le droit égalitaire qui semblait devoir caractériser la période commençant en 1946, va donc être remis en question par une mise en minorité du peuple premier kanak qui le fait pencher de nouveau dans une représentation politique inégalitaire.

            À partir des années quatre-vingts c’est donc autour de la question d’abord du droit de suffrage essentiellement kanak, ensuite du même droit acquis « aux victimes de l’histoire » admis à Nainville-Les-Roches en 1983, et enfin au respect d’une durée de résidence suffisante, que va s’articuler l’évolution statutaire de la Nouvelle-Calédonie.

            Ce sujet, que le peuple kanak avait bien compris comme primordial pour lui, allait être porté à l’ONU par des États membres du Forum du Pacifique soutenant le FLNKS  qui vont dénoncer les « vagues successives d’immigration » constituant un phénomène volontaire ayant « fortement altéré la démographie du territoire ». Pour corroborer cette thèse, le mouvement de libération s’appuie sur les résolutions 2621 (XXV) et 35-118 de l’Assemblée générale dans lesquelles « celle-ci demande aux États-membres d’adopter des mesures pour décourager l’afflux systématique d’immigrants dans les territoires sous domination coloniale ».

            Viennent s’ajouter à cette disposition de droit international des mesures d’ordre interne prises par le premier ministre français, Pierre Messmer où on pouvait, notamment lire : «À long terme, un soulèvement nationaliste du peuple autochtone ne peut être évité que si les populations non originaires du Pacifique et les français européens forment la majorité démographique et il va sans dire que cela ne peut être accompli que par une migration systématique des femmes et des enfants et la création d’une classe moyenne de petites entreprises ».

            Alors qu’en 1946 le droit français, avait permis au peuple premier kanak d’accéder à la citoyenneté et ses déclinaisons en matière d’égalité et particulièrement, en lui octroyant le droit de vote quand il était majoritaire, en 1983, la Nouvelle-Calédonie comptait 145 368 habitants répartis de la manière suivante :

  • Kanak autochtones……61 870 soit 42,6 % de la population
  • Colons, européens……. 53 974 soit 37,1 %
  • Wallisiens et Futuniens ….12 174 soit 8,4  %
  • Tahitiens ………………5 570 soit 3,8  %
  • Indonésiens……………. 5 319  soit 3,7 %
  • Vanuatuans……………. 1 212 soit 0,7 %
  • Vietnamiens……………2 381 soit 1,6 %
  • Divers…………………. 2 868 soit 2,0 %

            C’est donc sur ces deux fondements et sur ces chiffres, que le FLNKS s’appuie pour affirmer qu’il y a bien eu une politique volontaire d’immigration pour le rendre minoritaire dans son propre pays, et par conséquent demande que le droit de vote revienne au seul peuple premier kanak pour bénéficier d’une représentation politique qu’il considère comme égalitaire.

            Cette exclusivité d’un vote kanak pour l’autodétermination, laquelle n’est pas prévue par le droit français au nom du principe d’égalité d’après 1946, conduit les représentants du peuple premier kanak, lors de la déclaration de Nainville-les-Roches du 12 juillet 1983, à reconsidérer cette position en acceptant « d’ouvrir le concept d’autodétermination à la participation de Calédoniens non Kanak, qualifiés de  victimes de l’histoire ».

 C- Un droit de vote ouvert aux « victimes de l’histoire »         

            L’ouverture aux « victimes de l’histoire » est une concession essentielle des représentants indépendantistes du peuple premier kanak, en même temps qu’elle contribue à forger une identité calédonienne, à partir du socle d’un vote kanak exclusif au nom d’une culture, d’une terre, d’une population que le droit français n’a pas su emmener vers la liberté.

            Néanmoins, d’un strict point de vue juridique, il ne nous semble pas y avoir de degré différent dans l’appréciation de la légalité des deux concepts, et un droit de vote kanak ou un droit de suffrage ouvert au « victimes de l’histoire » seraient susceptibles de porter atteinte de toute manière à l’égalité républicaine, synonyme d’inégalité pour le peuple premier kanak.

            Concernant un droit de vote ouvert aux victimes de l’histoire, ce concept se rapproche du mode électoral mauricien et qui avait en son temps été utilisé en Nouvelle-Calédonie pour la représentation des chefferies kanak au sein des municipalités.

            Ainsi, le système électoral mauricien « présente une originalité qui oscille entre impératifs d’une représentation nationale et revendication des identités communautaires » puisque « soixante-deux des soixante-dix députés mauriciens sont élus sur la base du scrutin uninominal à un tour… », et « les députés restants sont nommés sur la base de leur score et surtout de leur appartenance ethnique ».

            À partir de ce constat qui a dû être fait par les différentes parties, ce droit français opère une modification dans la façon d’appréhender la question du corps électoral appelé à être consulté pour un scrutin d’autodétermination : l’approche par la durée de résidence.

D- L’octroi du droit de vote sous condition d’une durée de résidence
suffisante :

            Les accords de Matignon avaient déjà fixé une restriction au droit de vote en écartant certains citoyens arrivés récemment en Nouvelle-Calédonie pour le scrutin d’autodétermination, d’une part, mais également pour les élections aux assemblées provinciales, d’autre part. (même si dans ce dernier cas, la promesse n’avait pas été tenue).

            Avec l’accord de Nouméa du 5 mai 1998, l’article 188 de la loi organique statutaire du 19 mars 1999 « fixe essentiellement une condition de résidence de dix ans pour avoir la qualité de citoyen de Nouvelle-Calédonie ».            

            Ainsi, deux listes étaient constituées, une liste électorale spéciale « satisfaisant à la condition de résidence de dix ans dressée à partir de la liste électorale générale en vigueur de l’ensemble des électeurs (pour toutes les autres votations) et du tableau annexe des électeurs ne satisfaisant pas à la condition de résidence de dix ans et dès lors non admis à participer au scrutin provincial ». En pratique, « chaque année, le tableau annexe s’enrichit des nouveaux électeurs qui viennent d’arriver en Nouvelle-Calédonie et s’inscrivent sur la liste électorale générale, mais non sur la liste électorale spéciale ». Dans une telle interprétation, « le tableau annexe perd des électeurs qui viennent d’atteindre dix ans de résidence, et sont dès lors inscrits sur la liste électorale spéciale » ; d’où les concepts de corps électoral « glissant » ou « figé ».

            Certains auteurs semblent accorder peu d’importance au caractère « glissant » du corps électoral restreint pour l’élection du congrès et des assemblées de provinces et pense que « le caractère glissant du tableau annexe ne fera pas sentir ses effets avant 2008 ». Or, le fait de considérer un caractère glissant dont les effets ne seront notables qu’en 2008 pose déjà en lui-même la difficulté pour les indépendantistes kanak de laisser en l’état l’interprétation du Conseil constitutionnel sur l’article 188 de la loi organique modifiée relative à la Nouvelle-Calédonie du 19 mars 1999.

           En effet, comme le dit Jean-Yves Faberon, avec une interprétation « souple dite du processus du tableau glissant, au fur et à mesure que les années passent, de nouveaux électeurs atteignent la condition de dix ans de résidence, sortent du tableau annexe et sont inscrits sur la liste électorale spéciale « sans que cela soit limité dans le temps ». A contrario, « selon une  interprétation stricte du corps électoral « figé » ou « gelé », le tableau annexe est bloqué dans sa composition de 1998, année de la signature de l’accord de Nouméa : c’est le tableau des électeurs de Nouvelle-Calédonie non admis à participer au scrutin prévu pour 1998 par la loi référendaire de 1988 consécutive aux accords de Matignon qui posait déjà pour ce vote une condition de résidence de 10 ans ».

            Avec une augmentation de la population de la Nouvelle-Calédonie entre 1996 et 2009 de 50 000 habitants pour atteindre les 245 580 habitants, la question mérite d’être posée des conséquences d’un corps électoral ni « gelé », ni « glissant » si nous prenons le solde migratoire du recensement de 2009 avec un solde naturel de 85 % ; et un  solde migratoire apparent de 15 %. Ainsi entre 2004 et 2009 « 18 500 personnes nées hors de la Nouvelle-Calédonie s’y sont installées ; elles sont originaires de métropole pour la plupart (75,5 %), mais aussi de l’étranger (17,3 %), de Wallis et Futuna (4,9 %) ou de Polynésie française 
(2,3 %)
 », ce qui fait de la Nouvelle-Calédonie « un des rares pays de l’Océanie dont le solde migratoire est positif ».

            Si nous considérons que 34,4 % de la population de la Nouvelle-Calédonie a moins de 20 ans, et que sur ces 18 500 nouveaux habitants le reliquat soit 65,6 % pouvait composer un corps électoral ouvert, nous nous retrouvons avec un potentiel de 12 136 personnes susceptibles de voter.  

            Quelle est la proportion du peuple premier kanak dans les chiffres du dernier recensement de 2009, après celui intervenu en 2004 qui ne comportait pas de référence à l’ethnie ?

            Il résulte des chiffres du dernier recensement de 2009, que « 40,3 % des habitants de Nouvelle-Calédonie déclarent appartenir à la communauté kanak (99 100 personnes) », alors que « la deuxième communauté la plus représentée est celle des Européens : 29,2 % des déclarations, soit 71 700 personnes » ; et enfin « suivent les Wallisiens et Futuniens, avec
8,7 % (21 300 personnes)
 ».

            Si nous nous référons aux chiffres du recensement de 1983 où la Nouvelle-Calédonie comptait 145 368 habitants, un peu plus d’un quart de siècle plus tard, la proportion de Kanak dans la population totale diminue, passant de 42,6 % à 40,3 % même si en valeur absolue, celle-ci augmente d’un tiers : 99 100 pour 61 870 en 1983.

            En d’autres termes, dans l’immédiat, la croissance naturelle du peuple premier kanak s’avère insuffisante pour contrebalancer sa proportion dans la population totale, et un solde migratoire positif, et partant sa place dans le paysage institutionnel et politique de son propre pays, sauf pour celui-ci à se satisfaire de la situation politique des Aborigènes australiens ou des Maoris néo-zélandais, si le droit français n’avait pas pris de dispositions discriminatoires.

            Si en théorie, le peuple premier kanak, comme les citoyens de l’article 188 de la loi organique modifiée relative à la Nouvelle-Calédonie du 19 mars 1999, dispose d’un droit de vote préférentiel, il n’en demeure pas moins que malgré leur statut coutumier, certains Kanak sont inscrits sur le tableau annexe.

Le corps électoral figé : des Kanak, citoyens de statut coutumier non-inscrits

La commission Politique et citoyenneté du FLNKS et du Parti travailliste comme rappelé par Mme Madeleine Ounou, est « une commission qui essaye d’améliorer l’inscription des populations kanak sur la liste électorale spéciale dans chaque commune », qui « a vu le jour en mai 2009 dans le cadre de l’organisation mise en place dans le Sud après les élections provinciales et sur la base d’un travail commencé par des militants délégués représentant le FLNKS dans les commissions de contrôle des listes spéciales de Nouméa ».

L’objectif de cette commission « de tout mettre en œuvre pour que les premiers citoyens du Pays, le peuple Kanak, soient dans la situation de pouvoir exercer son droit de vote aux prochaines élections provinciales de 2014 et lors du référendum après 2014 », pose en lui-même la problématique des Kanak non-inscrits sur la liste spéciale. En effet, la commission découvre « en feuilletant les Tableaux Annexes (TA) en mairie de Nouméa, la présence de nombreux kanak » c'est-à-dire des « électeurs qui ne sont pas admis à voter aux élections provinciales », tout en se demandant « comment peut-on empêcher des Kanak de voter pour leur propre pays ? » La commission a ainsi relevé le nombre de « 1 870 dont 1 544 dans les 4 grandes communes du Sud », mais également des Kanak qui ne voteront pas en 2014 : « 126 à Lifou, 18 sur Houailou, 25 sur Maré, 16 à Ponérihouen ».

Pour faire entendre ses revendications, la commission a saisi au nom des électeurs kanak non-inscrits sur la liste spéciale, le tribunal de première instance de Nouméa, devant lequel elle a été déboutée, et a essuyé le même rejet devant la Cour de cassation. Après ces recours, motivés sur l’argument que « tous ces  électeurs kanak doivent pouvoir exercer leur droit à l’autodétermination réservé aux peuples colonisés », la commission a transmis « toutes les listes des électeurs kanak de 2011, à la Cour européenne des droits de l’homme ». 

             Par ailleurs, la commission a bien recensé « 4 445 électeurs nés en Nouvelle-Calédonie  », et « les 1 870 Kanak sont compris dans les 4 445 », de ce fait, « il ne reste donc que 3 020 électeurs qu’il s’agira de faire figurer sur la liste spéciale ». Mais si la commission préconise de vérifier que les 3 020 électeurs potentiels répondent bien aux conditions fixées par la loi organique modifiée relative à la Nouvelle-Calédonie, elle considère néanmoins que « pour les 1 870 électeurs Kanak, le problème ne se pose pas de la même façon. Les Kanak sont de fait tous citoyens en tant que premier occupant du Pays, donc leur transfert sur la liste spéciale devrait se faire sans problème particulier ».

Le droit de vote kanak : un droit inutilisé     

Dans ses recherches ayant abouti à identifier les 1 870 électeurs non-inscrits sur la liste spéciale, la commission a eu à déplorer le fait « que beaucoup de personnes kanak ne sont pas encore inscrites sur la liste électorale ». La commission a ainsi relevé, parmi les raisons avancées, que « beaucoup pensent qu’aller s’inscrire sur la liste électorale, c’est faire comme les Blancs » ;  ou bien « d’autres disent, la politique ça ne m’intéresse pas, pourquoi prouver que je suis du Pays ? » ; ou encore « il faut apporter beaucoup de papiers qu’on n’a pas toujours ». À ces arguments, la commission rétorque que « quelles que soient les bonnes raisons que l’on peut avoir, il faut peut-être devenir conscient que, ne pas s’inscrire sur la liste électorale, c’est laisser les autres décider à notre place, c’est se mettre dans un statut de marginalisés qui existe encore mais que l’on combat, c’est être un étranger dans son propre pays ».

            Ces éléments indiquent que le droit de vote, accordé au peuple premier kanak en 1946 pour les premiers, et en 1957 pour la totalité, ne semble pas vraiment atteindre toutes les franges des électeurs kanak mêmes régulièrement inscrits. Aussi, les 1 870 électeurs kanak non-inscrits sur la liste spéciale pose la problématique plus globale du vote des électeurs kanak, ou plus précisément du phénomène d’abstention chez le peuple premier kanak dont on peut rapprocher des dispositions du projet de Constitution de Kanaky de 1987 qui prévoyait un vote obligatoire.

Le caractère inégalitaire de la restriction du droit de vote, dans le cas exclusif de la Nouvelle-Calédonie, est encore illustré par une décision toute récente du Conseil constitutionnel.  

Le Conseil, dans sa décision n°2012-279 QPC du 5 octobre 2012 sur le régime des gens du voyage, confirme la pratique de l’égalité républicaine de principe en matière de droit de vote. Le droit électoral inégalitaire en vigueur en Nouvelle-Calédonie a donc un caractère exceptionnel confirmé, et propre au contexte de décolonisation spécifique à ce pays.

Les mesures discriminatoires ne bénéficiant pas au seul peuple kanak sont d’une approche différente, par rapport à ce que nous venons d’examiner, puisque la question de la race est écartée, de même que celle de la religion, pour ne retenir que la seule référence à la citoyenneté de la Nouvelle-Calédonie, dont il nous faut analyser les contours.

 E- La citoyenneté comme corollaire du droit de vote

            La citoyenneté de la Nouvelle-Calédonie se caractérise par un droit inégalitaire réunissant le peuple premier kanak et les résidents.

Par rapport au particularisme de la citoyenneté calédonienne déterminée par le droit français, la citoyenneté « est le statut du national qui accède véritablement à la majorité politique, ayant l’âge requis par la loi et l’honorabilité du point de vue du droit pénal », et c’est « ce qui ouvre la voie à la participation à la vie politique (droits et devoirs) dans l’État ».

            De ces principes, la citoyenneté va recouvrer deux grandes catégories de droits individuels et politiques, d’une part, « les droits dits civiques, et politiques : notamment le droit de vote (historiquement fondateur de la citoyenneté), et les droits fondamentaux ou libertés publiques fondamentales qui sont le cœur même des valeurs républicaines » et d’autre part, « l’ensemble des droits sociaux-économiques et culturels, par définition variés et adaptables aux différentes situations ». Après « la citoyenneté retenue » de l’époque coloniale avec des « citoyens de seconde zone » dont était partie intégrante le peuple premier kanak, l’acquisition de la citoyenneté en 1946, et un droit de vote étendu à toute sa population en 1957 vont permettre à celui-ci d’être un citoyen à part entière.

En dépit d’une conception française universaliste de la citoyenneté, « la mise en place d’une citoyenneté différenciée en Nouvelle-Calédonie constitue une nouvelle dérogation en droit constitutionnel français ».

Mais cette dérogation ne constitue pas pour autant une nouveauté puisque c’est la citoyenneté européenne qui a remis en cause le principe d’unicité de la citoyenneté. De ce fait, « la constitution française a admis la simultanéité de deux types de citoyennetés » ; « la première, originaire, est basée sur la souveraineté nationale et induit la seconde, fondée sur les compétences transférées à l’Union ». Ainsi, « contrairement à ce qu’affirme le professeur Gohin, la citoyenneté calédonienne ne doit pas être considérée comme un « vecteur d’exclusion », et « la nécessité politique qui justifie son existence impose de se placer d’un point de vue local et non national comme le fait l’auteur ».

Pourtant, si ces interprétations ou conceptions de la citoyenneté de la Nouvelle-Calédonie qui, rappelons-le ne concernent pas que le peuple premier kanak, peuvent constituer des entorses juridiques à la Constitution française, elles ne doivent pas faire oublier que ce peuple attend une décolonisation depuis 1946, qui n’a pas débuté en 1998.

Il nous semble difficile d’élaborer des analyses juridiques en évoquant les déclarations ou textes fondamentaux sur lesquels s’appuie le droit français pour déclarer ou non qu’un texte serait contraire ou pas au principe d’égalité, en utilisant des termes aussi forts que «  vecteur d’exclusion », faisant abstraction d’un contexte où le même droit d’exclusion dans une politique assimilationniste a été érigé en principe.

En d’autre termes, si nous sommes bien dans un État de droit, sans dénier la pertinence ou la réalité de certaines analyses, une interprétation juridique contextualisée qui ne se limiterait pas aux seules « entorses » au droit positif constitutionnel peut avoir pour conséquence de considérer les dispositions législatives prises comme un droit qui, sans le renier, accompagne son temps ; et il nous semble que la citoyenneté de la Nouvelle-Calédonie y participe.

Extraits tirés de la thèse de droit public de Léon Wamytan

 


Jean-Yves Faberon : L’identité kanak de la Nouvelle-Calédonie en droit,  in Jean-Yves Faberon (dir.), La Nouvelle-Calédonie pour l’intégration mélanésienne, op. cit., p. 140.

Guy Agniel,  De la collectivité humaine à la collectivité de droit commun…, op. cit., p. 43.

« Il sera complété par d’autres arrêtés locaux : arrêté du 27 juillet 1907 relatif à la fixation du nombre des membres des commissions municipales, arrêté du 21 mars 1935 relatif à la fixation du nombre des commissions municipales ». Ibid.  

BONC 1888, p. 231 à 250

Guy Agniel, De la collectivité humaine à la collectivité de droit commun…, op. cit.

Ibid.

Ibid.

« Qu’on songe que dans l’autre grande colonie française de peuplement, l’Algérie, il y avait en 1962 un million d’Européens, mais aussi 10 millions d’indigènes ! Dès lors l’issue était inéluctable ». Ibid.

Ibid.

Lettre datée du 2 octobre 1986, adressée au président de l’Assemblée générale par le représentant permanent de Fidji auprès de l’organisation des Nations unies, Bwenando, Nouméa, 1986.

Ibid.

Cf annexe n° 7.

Ibid.

Jean-Yves Faberon : L’identité kanak de la Nouvelle-Calédonie en droit,  in Jean-Yves Faberon (dir.), La Nouvelle-Calédonie pour l’intégration mélanésienne, op. cit., p. 145.

Laurent Sermet : L’Île Maurice, in Destins des collectivités politiques d’Océanie, Volume 1, Théories et pratiques, sous la direction de Jean-Yves Faberon, Viviane Fayaud et Jean-Marc Regnault, op. cit., p. 156-164.

Cette approche a été utilisée dans le cadre de l’accession à l’indépendance du territoire des Afars et des Issas où une durée de résidence avait été également prévue en 1976.

Jean-Yves Faberon : La révision constitutionnelle du 24 février 2007 sur le corps électoral de Nouvelle-Calédonie, Revue française de droit administratif, 2007.

Ibid.

Jean-Eric Schoettl, Mise en œuvre de l’accord de Nouméa, AJDA, 1999, p. 332.

Voir les résultats du recensement de 2009 sur  http://www.isee.nc

Ibid.

Ce chiffre peut varier à la baisse ou à la hausse : car nous ne comptabilisons pas les 18-20 ans qui ont la capacité électorale, et pour  ne prendre que les chiffres concernant les personnes rentrées entre le 1er janvier 2004 et le 1er janvier 2009 pour tenir compte des délais de domiciliation dans une commune pour pouvoir s’inscrire sur les listes électorales fixées à  mois.

Voir les résultats du recensement arrêtés à la date du 27 juillet 2009 sur  http://www.isee.nc

En 2011, la commission est devenue commission du FLNKS, validée par le bureau politique du front et étendue au parti travailliste, Mme Madeleine Ounou est une responsable de ladite commission.   

Ibid.     

Charles Cadoux : Considération générales, in Destins des collectivités politiques d’Océanie, Volume 1, Théories et pratiques, sous la direction de Jean-Yves Faberon, Viviane Fayaud et Jean-Marc Regnault, op. cit.,
p. 125-127.

Ibid.

Carine  Gindre-David : Essai sur la loi de pays calédonienne, la dualité de la source législative dans l’Etat unitaire français, l’Harmattan, 2009, p. 29.

« Avec cette citoyenneté européenne, « des ressortissants des pays membres de l’Union européenne jouissent de droits particuliers sur le territoire français ». Ibid.              

Ibid. 

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7 février 2014 5 07 /02 /février /2014 02:29

6720, c'est le nombre de personnes qui ne devraient pas figurer sur les listes électorales spéciales. Roch Wamytan, de retour de sa visite à l'ONU, la semaine dernière, et puis avant sa visite à l'hôtel Matignon, la semaine prochaine, le président du Congrès s'appuye sur le travail de la commission des listes du FLNKS et du Parti travailliste. 
Pour rappel, ce ne sont pas des Calédoniens. Les critères sont basés sur des personnes qui sont nées hors du territoire, et après octobre 1980. Nous avons fait la comparaison des deux listes. C'est-à-dire, si ces personnes sont sur la liste spéciale de 2013, automatiquement, ils doivent figurer sur la liste générale de 1998. Or, cet ensemble de personnes, 6720, sont sur la liste spéciale, mais ne figurent pas sur la liste générale de 1998, en l'occurrence, ce sont des gens qui sont arrivés après 98 et n'ont pas le droit de vote.
Et si elles étaient présentes sans être inscrites sur la liste générale de 1998, nous nous baserons sur l'arrêt de la cour de cassation.


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16 septembre 2013 1 16 /09 /septembre /2013 11:12

Drapeau FLNKS dit drapeau Kanaky-copie-1

Déclaration du groupe FLNKS au Congrès de la Nouvelle Calédonie

(Projet de loi du pays sur les signes identitaires, mercredi 18 août 2010)

 

         Douze ans après la signature de l’accord de Nouméa, nous allons examiner le projet de loi du pays sur les trois premiers signes identitaires (hymne, graphisme des billets de banque et devise) qui ont fait l’objet d’un large consensus au sein du comité de pilotage des signes identitaires crée en avril 2007. Au nom du groupe FLNKS, je voudrais à ce titre remercier Madame Marie Noëlle THEMEREAU, présidente du gouvernement entre 2004 et 2007, Monsieur Harold MARTIN président de 2007 à 2009, Monsieur Philippe GOMES pour la finalisation du dossier depuis l’an dernier ainsi que madame Dewé GORODEY, présidente du comité de pilotage, pour leur implication active dans l’élaboration de ces trois premiers symboles officiels de notre pays. Nos remerciements vont aussi aux auteurs retenus par les différents concours et notamment la chorale « Mélodia » et bien sur aux membres du comité de pilotage.

 

Douze ans après la signature de l’accord de Nouméa, onze ans après l’adoption par le parlement de la loi organique, ce temps peut paraître long pour adopter les trois premiers symboles du pays, mais peut être cela était-il nécessaire pour que les esprits murissent et que les mentalités évoluent avant de trouver le consensus minimum sur ces signes qui comme l’indique l’accord de Nouméa « devront être recherchés en commun, pour exprimer l’identité kanak et le futur partagé entre tous ».  

 

          Nous sommes nécessairement dans un « temps long » lorsqu’il s’agit de créer les conditions pour faire émerger une conscience commune pouvant à terme évoluer vers la conscience d’appartenir à un peuple en devenir socle d’une éventuelle nation de demain. Le défi lancé par les accords de Matignon et Nouméa est un défi lancé à chaque portion de peuple réuni depuis 157 ans sur cette terre mélanésienne. Car au-delà de la dénomination que nous oblige la constitution française de nous appeler « communauté », chacun d’entre nous appartient originellement à un peuple.

 

         Peuple mélanésien, présent dans cette région depuis plus de 4000 ans, habitant cet arc du même nom depuis l’archipel des Moluques, l’archipel des Flores et Timor, à la grande Papouasie Nouvelle Guinée, les Salomon, Vanuatu ,les Fidji et la Nouvelle Calédonie, descendant de ce grand peuple austronésien qui s’est divisé en trois groupes que les européens ont appelés : mélanésiens, micronésiens et polynésiens, peuple qui s’est diffusé et répandu dans l’immensité du pacifique.

 

Peuple français et européen venus de 18.000 km au moment de la grande expansion coloniale et missionnaire avec ses administrateurs, religieux et pasteurs, colons, bagnards ou tout simplement aventuriers, tous venus comme on disait « apporter la civilisation » aux peuplades considérés comme sauvages. Peuple asiatique enfin, arrivé sur nos rivages avec les cohortes de travailleurs engagés.

 

Nous avons tous notre propre histoire, nos croyances, nos cultures et nous avons été malaxés, broyés dans le moule colonial pour donner en 2010, cette diversité que connait notre pays, véritable kaléidoscope aux couleurs de l’arc en ciel, couleurs revêtus par nos enfants, fruits d’un métissage vieux de 157 ans.

 

Le défi que nous nous sommes donnés est de faire de ces portions de peuple, rassemblés, sur cet archipel mélanésien de l’Océanie occidentale, par une histoire, celle de la colonisation française, un ensemble viable et responsable dont l’ambition pour certains est l’indépendance, pour d’autres un état associé, pour d’autre encore le degré le plus achevé de l’autonomie. Mais en attendant de parvenir à la croisée de ces trois voies, l’ambition est bien de constituer une entité propre capable de décider ensemble quelle voie choisir, quel destin assumer pour ses enfants, quelle nouvelle relation apaisée à trouver avec l’autorité de tutelle qu’est la France.

 

La France est loin, elle demeure physiquement dans ses frontières européennes, la Nouvelle Calédonie est en Océanie, elle porte dans sa chair les marques de cette vieille civilisation mélanésienne, plus vielle que la civilisation gallo romaine ou franque dont les lointains descendants l’ont colonisée. Parce que notre pays est le pays du non dit et que nous sommes sous tutelle, on n’utilise pas ou alors très pudiquement le terme de civilisation,  on va parler de culture et d’identité. A la place de Mélanésie on va parler de kanak, terme péjoratif puis revendiqué librement, dérivé de la langue Hawaïenne (Iles sandwich), les anciens hawaïens vont ainsi interpeller les marins de James Cook, pour qu’ils déclinent leur identité qui êtes vous ? Des esprits ou des « kanaka » ou « tagata » autre mot polynésien, c'est-à-dire « êtes-vous des hommes, des vrais hommes » ? Des « do kamo »comme dirait la langue Adjie, ou  « te aboru » en nra drubea. 

 

Comme indicateur de la route à suivre, semblable à l’étoile du berger, ces symboles que nous examinons ce jour porteront l’histoire de ces peuples auxquels nous appartenons, peuples posés cote à cote mais aussi engagés dans un processus de fusion appelé à donner naissance à quelque chose de nouveau que nous connaitront peut être pas de notre vivant. Cette histoire nouvelle en marche se fait ici en Mélanésie, c’est le futur partagé et c’est l’identité kanak qui s’expriment. Mais comme nous sommes pour le moment sous souveraineté française, ainsi que le précise la loi organique, ces symboles, déterminés librement permettront de marquer la personnalité de notre pays aux cotés de l’emblème national et des signes de la république.

 

Avec une histoire autant chargée que la nôtre, la définition de nos symboles identitaires ne peut que prendre du temps. Leur lente émergence ne peut s’enfanter que dans le sacrifice et le renoncement. Regardez ce qui ‘s’est passé pour la levée du drapeau kanak au coté du drapeau français. Cette levée était pour les uns un défi, un signe de guerre et de mort, pour les autres un immense espoir de reconnaissance, un signe de vie, un signe de paix. Où est le juste milieu ? Or il nous faut trouver le juste milieu car nous sommes des vivants et nous préférons comme tout être humain plus tôt la vie que la mort et la destruction.

 

Nous devons constamment chercher à nous comprendre, à faire un pas en direction de l’autre même si nous ne sommes pas tous d’accord, l’important c’est la volonté de se surpasser et d’avancer. A part les graphismes sur les billets de banque, nous avons des choses à dire et redire sur la devise et l’hymne.

 

             Terre de partage, terre de parole, oui mais qu’avons-nous encore à partager nous les kanak, la colonisation nous avait  pratiquement tout enlevé ! Que peut signifier le terme de « partage » alors que le modèle occidental nous impose une course effrénée à l’accumulation des richesses et du profit érigée en règle de vie ? Terre de parole, quelle est la valeur de la parole dans un monde ou tout ce qui n’est pas écrit est vain, où l’on passe son temps à chercher comment tromper l’autre ? C’est pourquoi, cette devise ne doit pas rester un vœu pieu, elle doit être la « parole » qui agit et engage, une forme de « parole performative » à l’instar du terme utilisé en théologie sacramentaire. L’hymne, il ne dit pas d’où l’on vient, rien sur nos itinéraires, alors comment savoir où l’on va si l’on ne dit pas d’où l’on vient. Dans la musique, il faut la  chercher l’identité kanak ! 

 

Félicitons nous et réjouissons-nous cependant d’être parvenus à ce stade, il s’agit encore d’un grand pas de franchi sur la voie de notre émancipation, certes des améliorations sont toujours possibles. Ainsi, comme pour le drapeau, nous avons toujours l’objectif de faire partager à tous le bien fondé du choix du drapeau kanak comme drapeau du pays. Mais c’est par la discussion, le dialogue et la concertation que nous arriverons tous à nous rallier aux symboles forts de l’identité calédonienne, prélude à une identité propre apte à s’autodéterminer librement dans un proche avenir.

 

 

 

Le chef du groupe FLNKS

   (Congrès de la Nouvelle Calédonie)

 

 

 

     ROCH WAMYTAN

 

 

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