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  • Roch WAMYTAN
  • Homme politique, membre de l'Union Calédonienne et du FLNKS, Signataire de l'accord de Nouméa en 1998, Président du groupe UC-FLNKS et Nationalistes au Congrès de la Nouvelle-Calédonie
  • Homme politique, membre de l'Union Calédonienne et du FLNKS, Signataire de l'accord de Nouméa en 1998, Président du groupe UC-FLNKS et Nationalistes au Congrès de la Nouvelle-Calédonie

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1 septembre 2012 6 01 /09 /septembre /2012 00:04

Retranscription "mot à mot"

RRB vendredi 31 août 2012

Journaliste : Nous recevons Rock Wamytan, l'ancien président du Congrès, bonjour.

Rock Wamytan : Bonjour.

Journaliste : Merci d'avoir accepté cette invitation. Vous étiez candidat à votre propre succession, vous étiez le candidat unitaire des indépendantistes, mais vous avez perdu la présidence au bénéfice de Gérard Poadja, le candidat de Calédonie ensemble. Il a recueilli la totalité des voix non-indépendantistes, 28 voix, et vous, 25. Franchement, vous vous attendiez à ce scénario ?

Rock Wamytan : Bien sûr, parce que nous avions évoqué les deux possibilités : la première possibilité : que je sois élu à la majorité relative au troisième tour ou cette possibilité-là, qui est arrivée. Je m'attendais, disons, que ce soit l'une ou l'autre, en fonction des décisions que devait prendre le Rassemblement.

Journaliste : Sur le déroulement du scrutin, vous arrivez en tête au premier et au deuxième tour, 24 voix, une de plus d'ailleurs que les indépendantistes, Simon Loueckhote, 17 voix, Gérard Poadja, 12. Vous avez pensé, à ce moment-là, que personne n'allait se désister ou vous avez vu très vite ce qui allait se passer ?

Rock Wamytan : À la fin du deuxième tour, après la proclamation des résultats, nous avions des rumeurs, des bruits qui courraient déjà depuis quelques jours, comme quoi Simon Loueckhote allait se désister au troisième tour. On se disait que, bon, peut-être, les discussions se sont poursuivies tôt dans la matinée, au sein du Rassemblement UMP, puisque, en fait, c'était le Rassemblement UMP qui avait la clé de l'élection. Le suspens a duré jusqu'au bout. Et au moment où madame Lèques a demandé s'il y a des candidats, quand j'ai vu que Simon ne levait pas sa main, je me suis dit : ah, je crois qu'il s'est plié.

Journaliste : Un mot sur le premier discours de votre successeur. Ce discours a été vivement critiqué, et vous, qu'est-ce qui vous a choqué dans cette prise de parole, est-ce que vous avez été choqué, ou non ?

Rock Wamytan : D'abord, j'ai été agréablement surpris, quand il m'a remercié par rapport au travail que j'ai effectué en tant que président de la commission de la vie chère. Ça, c'est vrai que c'est un travail dans lequel je me suis beaucoup investi, donc j'étais agréablement surpris que Calédonie ensemble ait reconnu ce travail que nous avons mené ensemble, avec les élus et l'intersyndicale USTKE. Et puis après, ça s'est un peu compliqué, son discours, j'étais même un petit peu choqué par rapport à ce qu'il a dit, notamment sur le président de l'UC, par rapport à ses propos. J'ai pensé que ce n'était pas le lieu idéal pour le faire. Il pouvait le faire, puisqu'il a été attaqué directement. Il aurait pu le faire, mais dans d'autres enceintes, pas au sein de l'hémicycle, au cours de son premier discours. C'est un discours d'investiture, en tant que nouveau président du Congrès de la Nouvelle-Calédonie et du fait aussi que c'est quelqu'un qui accède à cette fonction-là pour la première fois. Je pensais que c'était quelque peu déplacé de le dire à ce moment-là, il aurait pu le dire dans d'autres enceintes, au cours d'une conférence de presse ou…, voilà. Ensuite, ce qui m'a aussi interrogé ou en tout cas posé question, et un peu même inquiété, c'est quand il a commencé à parler des programmes qu'il souhaitait élaborer et proposer au Congrès de la Nouvelle-Calédonie, de façon à ce qu'ensuite, le gouvernement mette tout ça en place. Et là, je me suis dit : il s'est un peu trompé de fonction, parce que ça, c'est plus la fonction d'un président de gouvernement.

Journaliste : Il dit aussi que le fonctionnement du Congrès, quand il en prendra la présidence, sera plus transparent et plus démocratique. Vous ne l'avez pas pris, ça, comme une critique contre la manière dont vous avez géré…

Rock Wamytan : Là, j'ai pas compris…, c'est pour ça que je n'ai pas relevé ça, parce que j'ai pas compris ce qu'il a voulu dire exactement, parce que tout le monde avait reconnu le contraire. C'est-à-dire que depuis que j'étais président, ça a été la transparence. En tout cas, au niveau de la gouvernance, personne ne m'a fait de reproche au niveau du Congrès, au niveau de la bonne gouvernance du Congrès, dans la transparence. Le débat démocratique, je l'ai dit, puisque je l'ai dit à plusieurs reprises dans mes différents bilans, que le débat démocratique doit se faire au sein du Congrès, pas en dehors, et pas au gouvernement. C'est au niveau du Congrès qu'il fallait ramener le débat démocratique normal, un débat qui permet aux uns et aux autres de s'exprimer, non pas de venir profiter de cette enceinte pour contester tous azimuts, mais plus dans un cadre de participation à la réflexion, à l'analyse, à l'argumentation, au débat, argument contre argument, pour pouvoir trouver les compromis nécessaires sur les textes qui sont présentés. C'est pour ça que je n'ai pas très bien compris ce qu'il a voulu dire par là. Comme je suis le premier vice-président, et je pense qu'il le dira dans les prochains jours.

Journaliste : Calédonie ensemble a eu le sentiment, peut-être, que la minorité n'était pas assez prise en compte, et quand elle déposait des projets de textes, ils n'étaient pas forcément inscrits à l'ordre du jour. C'est pas ce qui s'est passé ?

Rock Wamytan : Moi, j'ai toujours tenté de prendre en compte toutes les propositions qui ont été déposées au sein du Congrès de la Nouvelle-Calédonie. S'il a voulu faire référence à la commission spéciale sur le drapeau ou sur d'autres textes notamment au niveau du minimum vieillesse et puis un autre texte, là, sur la modification de la clé de répartition, on ne peut pas présenter ces textes ou faire en sorte que ces textes viennent au débat, soit dans les commissions ou ensuite en séance publique, s'il n'y a pas un minimum d'accords politiques, parce que ce sont des fondamentaux de l'Accord de Nouméa. Sur la question, par exemple, de la clé de répartition, on ne peut pas analyser ou en tout cas examiner n'importe quel texte. Il faut qu'il y ait un minimum d'accords politiques entre l'ensemble des formations politiques et l'ensemble des présidents de provinces. C'est ce que j'ai fait, d'ailleurs, puisque j'ai interrogé, dernièrement, l'ensemble des présidents de provinces sur l'éventualité de mettre en place un groupe de travail spécifique sur cette problématique-là. Sur les trois présidents de province, jusqu'à présent, ou en tout cas, jusqu'au 28 août, il y a uniquement que Paul Néaoutyine, président de la province Nord, qui a répondu et qui a dit que lui, il s'opposait à la mise en place de ce groupe de travail.

Journaliste : Gérard Poadja, pour justifier ses déclarations à l'encontre du président de l'UC, Charles Pidjot, dit qu'il répond au fait qu'il avait laissé entendre, la veille, que si vous n'étiez pas élu, les indépendantistes retourneraient sur le terrain. Est-ce qu'il y a des menaces, est-ce qu'il va y avoir des conséquences, est-ce qu'on peut envisager des troubles, des réactions des indépendantistes au fait que vous n'ayez pas été reconduit ?

Rock Wamytan : Mais tous les responsables politiques ont fait les mêmes déclarations. Philippe Gomès, qu'est-ce qu'il a dit quand il a été débarqué de la présidence du gouvernement ? L'année dernière, il a dit qu'il faisait quoi ? Il retournait sur le terrain. J'ai entendu Pierre Frogier, président de la province Sud, qui va proposer la démission de son poste, pour faire quoi ? Pour retourner sur le terrain. Donc, tout le monde est en train de retourner sur le terrain, là. Pourquoi ? Parce qu'il y a 2014 qui approche et que tout le monde va être focalisé sur 2014, puisque chacun sait que 2014, ce sera une échéance capitale.

Journaliste : Retourner sur le terrain, ça ne veut pas dire créer des troubles, de l'agitation, des barrages ?

Rock Wamytan : Ah ben maintenant, c'est à chacun d'interpréter à sa sauce. Moi, quand je parle de terrain, c'est aller devant nos populations, nos militants, d'expliquer ce qu'on fait, d'expliquer le projet que nous devons porter pour 2014. Pour moi, faire le terrain, c'est cela.

Journaliste : Autre conséquence envisagée après le fait que les indépendantistes aient perdu la présidence du Congrès, est-ce qu'il peut y avoir des conséquences institutionnelles, notamment des conséquences au niveau du gouvernement ? Est-ce que les indépendantistes peuvent provoquer la chute du gouvernement pour protester contre le fait que vous n'ayez plus, aujourd'hui, la direction de l'une des institutions importantes de la Calédonie ?

Rock Wamytan : Ça peut être une stratégie envisagée par le mouvement indépendantiste. Il y aura des réunions, courant la semaine prochaine ou l'autre semaine après, et je pense qu'à ce moment-là, soit l'UC, ou le Palika, ou même au niveau du FLNKS, des décisions seront prises à ce moment-là. C'est vrai qu'on a très mal ressenti le fait d'avoir été débarqué, en tout cas moi, et même l'ensemble du mouvement indépendantiste, d'avoir été débarqué de la présidence. Pourquoi ? Tout simplement pour la bonne raison qu'on était partis jusqu'en 2014. À partir du comité des signataires de 2010, on s'était arrêté sur un certain nombre d'éléments à mettre en place avec le partenaire, le Rassemblement UMP, l'avenir ensemble, l'Avenir ensemble et le Parti travailliste, et ce partenariat, parce qu'il s'agit d'un partenariat, il n'y a pas eu d'accord écrit entre nous, ou signé entre nous, ce partenariat devait se poursuivre normalement jusqu'en 2014. Or, il s'est passé qu'avec les élections législatives, il y a eu une lecture un peu spéciale du résultat de ces élections-là, du fait que le corps électoral était différent. Le corps électoral pour les législatives, il n'est pas celui des provinciales. Or, la légitimité des institutions à l'heure actuelle, elle repose sur les résultats des élections de 2009, pas de celles de 2012, pour les législatives. Il se trouve que Calédonie ensemble a su habilement surfer sur cette problématique-là en mettant en avant les résultats des élections de 2012 pour dire que maintenant, c'est à nous de gérer les institutions, d'avoir une place importante à l'extérieur.

Journaliste : Il faut rappeler que Calédonie ensemble avait parlé de coalition, dès le début, pour qualifier la majorité que vous formiez et qu'il avait même présenté les législatives comme un référendum contre votre propre présidence. Est-ce qu'il n'est pas logique qu'ils en aient tiré les conséquences…

Rock Wamytan : Ça, c'est la position d'un responsable politique parmi d'autres. Les indépendantistes ne se sentent pas liés par ce référendum lancé par Philippe Gomès, à la suite, du fait qu'il a été débarqué de la présidence du gouvernement. Nous, nous ne sommes pas liés, il ne s'agit pas d'un référendum. Il s'agit tout simplement d'une élection. C'est lui qui en a fait un référendum. Mais le problème, quand il a gagné ces élections-là, très curieusement…, je dis curieusement, parce que c'est un paradoxe, parce qu'il va utiliser le résultat de ces élections législatives, alors qu'on sait bien que ce n'est pas le même corps électoral qui s'est exprimé que celui de 2009. Il va utiliser ce résultat-là pour ensuite exiger des changements. Et les changements qu'il exigeait, c'est quoi ? Il était parti, quand même, à la campagne électorale avec au moins trois problématiques identifiées. Un, contre la levée du drapeau kanak. Deux, pas d'indépendantiste au Congrès, donc il faut démarquer Wamytan, et trois, cet accord secret d'une indépendance-association, qui était en train d'être organisée, fomantée derrière le dos des Calédoniens. Sur ces trois points-là, le drapeau, il y a eu un peu de rétropédalage qui a été fait. Sur l'indépendance-association qui est en train de se faire sur le dos des Calédoniens, il s'est avéré que c'est complètement faux, cette affaire-là. Il reste quoi, finalement ? Il reste à débarquer Wamytan. Donc, j'étais, quelque part, sacrifié, j'étais un peu un holocauste. À l'époque, au temple de Jérusalem, on offrait des holocaustes à Dieu, et là, c'est Wamytan qui a été offert en holocauste, au Dieu Gomès. Plus sérieusement, c'était la seule formule qui leur restait pour pouvoir bien s'afficher. Maintenant, une fois qu'ils sont affichés, moi, ce que je dis, je mets en avant notre vieille sagesse millénaire océanienne, il faut maintenant travailler. Il faut quand même que les choses se calment. Pourquoi ? Tout simplement parce que nous avons un an et demi et nous avons déjà trop pris de retard avec ce genre de conflits, les 15 dernières années qui viennent de se passer. Ça veut dire qu'il faut terminer le déroulé normal de l'Accord de Nouméa, puisque normalement, on arrive à la fin du processus et on a encore des choses à faire. Tous ces transferts-là, il faut les terminer. Les transferts de l'article 27, notamment sur la question de l'université, les communications audiovisuelles, etc., tout cela, il faut les terminer, de façon à ce que nous arrivons, en 2014, et nous aurons, à ce moment-là, respecté tout le déroulé de l'accord. Vous voyez ? Donc, c'est important. Moi, c'est sur cet axe-là sur lequel je me pose, pour dire que tous les conflits qui ont eu lieu depuis, à un moment donné, il faut que ça s'arrête, ça, au moins, pour terminer le travail. Pourquoi ? Parce que nous avons un pays à construire, et on ne peut pas, à chaque fois, à chaque pas que nous essayons de mettre, à chaque pierre que nous essayons de mettre à l'édifice que nous sommes en train de construire, nous occuper, à chaque fois, ou être des spectateurs des états d'âme des uns et des autres, des combats d'egos, etc. À un moment donné, il faut s'arrêter et puis il faut s'occuper des besoins de la population. C'est pour ça que sur la question de la vie chère, je me suis impliqué, mais personnellement et à fond, pour pouvoir arriver à signer cet accord le 12 juin dernier.

Journaliste : Au vu des résultats des législatives, est-ce que vous n'avez pas eu le sentiment que les Calédoniens non-indépendantistes n'avaient pas forcément compris cette nouvelle majorité et est-ce que vous ne portez pas votre part de responsabilité dans le fait qu'ils n'aient pas compris ? Les objectifs que vous poursuiviez ?

Rock Wamytan : En tout cas nous, de notre côté, ils nous ont bien compris. C'est à chacun sa tente, chacun sa maison. Nous, de notre côté, nous avons expliqué, on a quand même eu un peu de mal aussi à expliquer, parce que ce partenariat-là, entre des partis indépendantistes et partis non-indépendantistes, ce n'était pas bien compris dans notre camp et on a été pris à parti. Il a fallu expliquer, expliquer au niveau de l'UC, même au niveau du FLNKS. Un parti comme un groupe politique comme l'Uni, bon, l'Uni n'avait pas à partager spécialement ce partenariat. Donc, il a fallu qu'on explique. Du côté du camp non-indépendantiste, et notamment de l'initiateur, qui était Pierre Frogier, je pense qu'il y a eu une lacune à ce niveau-là ou un manque d'implication pour expliquer. C'était vraiment une bonne idée, une idée généreuse et un geste fort. Moi, je l'ai toujours dit, que c'est un geste fort. Encore, fallait-il que ce geste ou cette idée généreuse soit partagé par le lus grand nombre ? C'est là où il y a eu un manque d'implication, peut-être, de toute la structure politique, pour pouvoir informer et faire passer dans la population. Parce que, ce n'est pas quelque chose d'extraordinaire. Sur la question du drapeau, on l'a dit à plusieurs reprises. Le drapeau flotte en Nouvelle-Calédonie déjà depuis un peu plus de 20 ans. C'était pas quelque chose d'extraordinaire de lever le drapeau. Mais, par contre, il aurait fallu mieux l'expliquer. Le partage des responsabilités, au moment où le gouvernement Gomès tombe, on nous a proposé le poste de président du Congrès, c'est pas quelque chose aussi d'extraordinaire puisque c'était une question dont on avait débattue au moment des discussions en 1998. On avait essayé de voir dans quelle mesure les deux groupes, d'un côté, indépendantistes, et de l'autre côté, non-indépendantistes, puissent, en alternance, présider, ou le Congrès, ou le gouvernement. Donc, ce n'était pas quelque chose de farfelu ou d'hallucinant. Mais, voilà, c'est une autre chose qui a été aussi mal expliquée de la part du camp non-indépendantiste. Pour nous, ce n'était pas un problème.

Journaliste : D'autant plus que c'était très instrumentalisé par l'opposition ?

Rock Wamytan : Voilà, il y a eu cet élément là aussi. Philippe Gomès, avec Calédonie ensemble, ont vraiment instrumentalisé ce processus dans lequel nous nous sommes trouvés à partir de 2010-2011.

Journaliste : Mais tout de même, dès février dernier, Pierre Frogier vous demandait de faire preuve de moins de frilosité vis-à-vis de votre base, de plus de détermination et probablement, disait-il, de plus de courage. Et la semaine dernière, lors du comité directeur du Rassemblement, il a déclaré que les indépendantistes n'avaient pas été à la hauteur des enjeux que, par calcul ou par faiblesse, ils ont été incapables d'envoyer en retour les signes que, dit-il, nous étions en droit d'attendre. Avec le recul, vous regrettez pas de pas avoir su envoyer les signes qu'il fallait, pour convaincre davantage, des objectifs que poursuivait cette majorité ?

Rock Wamytan : Jusqu'à aujourd'hui, j'ai un peu de mal à savoir exactement, c'est de quels signes parle le président du Rassemblement UMP. Parce que, quand on en a parlé, de cette initiative, quand on a partagé sur cette idée généreuse, nous n'avions pas évoqué une contrepartie des indépendantistes. Et le problème, c'est qu'il aurait fallu une position commune de l'ensemble des mouvements indépendantistes. Or, il s'est trouvé que sur ce partenariat-là, nous n'avions pas une position commune au sein du mouvement indépendantiste, parce que l'Uni ne s'est pas associé, pour les raisons qui étaient les leurs, et ça a posé débat et des remous internes au FLNKS. Comment voulez-vous qu'on fasse des pas ou qu'on réponde à une sollicitation de la part du président du Rassemblement UMP, si nous-mêmes, on n'était pas ensemble pour pouvoir dire : ça sera la clé de répartition ou ce sera un pas en arrière, sur la question de l'indépendance ? C'est pas possible. Ça, c'était hors de question, ce n'était pas possible. Si nous étions tous ensemble, à accepter, et les propositions, et les demandes de contreparties, on va dire ça comme ça, peut-être qu'on aurait pu faire un geste, mais je ne sais pas quoi comme geste.

Journaliste : Est-ce qu'il n'y a pas eu des déclarations un peu violentes, un peu brutales, le fait de réaffirmer le refus de négocier, le fait de réaffirmer l'objectif de, je cite, Kanaky 2014 ? Est-ce que tout ça, ça n'a pas créé un climat qui donnait l'impression que, finalement, vous n'étiez pas en phase les uns, avec les autres ?

Rock Wamytan : Vous savez, le problème, c'est que, quand on parle devant une foule, quand on parle devant des militants, et quand la télé est là, on ne pense pas toujours aux partenaires institutionnels. On parle pour nos militants et on dit des choses. Le problème, c'est que la télé, ensuite, sur 20 minutes de discours, il va vous prendre seulement qu'un seul mot, et puis, ensuite, ça va partir dans tous les sens. Mais c'est comme nous, par exemple, de notre côté, lorsque le président Frogier a dit, dans une des grandes réunions, que la dernière concession, ce sont les indépendantistes qui allaient le faire en choisissant de rester avec nous dans la France. Mais nous, chez nous, au niveau des indépendantistes, on a été pris à parti, aussi, c'est-à-dire ceux qui étions dans ce partenariat-là, ont dit : vous avez vendu quoi ? Vous avez vendu la cause kanake à qui ? Il a pris cette posture-là. Je l'avais expliqué, ici, sur RRB, en tout cas, j'essaye d'interpréter ça comme main tendue, aussi, pour les discussions sur l'avenir du pays. Mais s'il est convaincu lui-même que ce sera la dernière concession que nous allons faire, ça, c'est sa position. Mais au moment où il annonce ça à ses militants et à ses responsables, nous, comme tout le monde, on entend à la radio et à la télé et on se demande : mais qu'est-ce qu'il a voulu dire, par là ?

Journaliste : Ça veut dire qu'aucun dialogue n'est possible et qu'entre indépendantistes et non-indépendantistes, la Calédonie est condamnée au bloc contre bloc, au moins, jusqu'en 2014 ?

Rock Wamytan : Non, je pense qu'à partir d'idées généreuses, comme celles de Pierre Frogier, je pense que c'est au niveau de la méthode. Ce sont des idées, mais ensuite, il faut bien caler la méthode, comment qu'on fait admettre ça à tout le monde parce que les gens, ils ne sont pas aussi bloqués que ça. Bien sûr, chacun a ses idées. Mais quand on a des idées nouvelles et généreuses, comme ça, il faut savoir les faire partager et on essaye de définir des méthodes et des stratégies. Peut-être, c'est un petit peu là qu'on a (?) les uns, les autres, parce que c'est une responsabilité, d'abord, et avant tout, du Rassemblement UMP, donc, de son chef. C'est lui qui a pris l'initiative. Nous, à notre niveau, comme je l'ai expliqué à plusieurs reprises, nous n'étions pas demandeur de cela. Ni de lever le drapeau, ni de présider le Congrès, ni d'ouvrir les discussions tout de suite, puisque nous sommes dans le déroulé de l'accord. À partir du moment où il nous fait cette proposition, c'est un responsable politique, c'est un signataire, donc, nous prenons en compte et nous prenons en considération ce qu'il nous propose. Donc, on se met ensemble et on discute pour voir comment qu'on peut avancer. Et je pense que c'est au niveau plus de la méthode, de la stratégie. Mais ça ne veut pas dire que tout est définitivement cassé. C'est sûr que, en tout cas, les indépendantistes, et notamment ceux qui sont proches, qui ont été dans ce partenariat-là, c'est vrai que nous avons très mal vécu ce qui s'est passé le 29 août, très, très mal vécu. Maintenant, il faut voir comment qu'il faut rebondir parce que, dans tous les cas de figure, à un moment donné, il va bien falloir discuter.

Journaliste : Les comités de pilotage qui avaient été lancés en juin 2010, un peu dans cet état d'esprit déjà de travailler ensemble, le comité des signataires, ça va pouvoir continuer comme avant ou le cœur n'y est plus et chacun va retourner dans son coin ?

Rock Wamytan : Les comités de pilotage ont fait un bon travail et le comité de pilotage du bilan a pratiquement terminé son travail. Il y a le comité sur l'avenir institutionnel, je pense qu'il faut continuer aussi le travail à ce niveau-là, même si ce partenariat que nous avons mis en place en 2010, qui est mort maintenant, c'est terminé, on en parle plus. Donc, il faut voir les choses maintenant différemment, les reprendre différemment, pour le bien du pays et pour le bien de notre population aussi, de façon, peut-être, un peu plus dans la transparence, ou je ne sais pas. On a besoin d'un peu de temps pour faire l'analyse sérieuse de la nouvelle donne née des élections législatives et puis la nouvelle donne du 29 août, là. On a besoin que les uns et les autres analysent bien la situation pour pouvoir ensuite poursuivre le travail. Mais il n'en reste pas moins que ces comités-là, ils ont leur raison d'être, pour moi, personnellement, et ça, ce n'est pas une position, que je donne, de parti ou même du FLN. Pour moi, personnellement, je pense qu'il faut continuer dans ce sens-là. Il faut continuer à faire vivre ces comités, mais c'est vrai que la confiance entre les uns et les autres a été quelque peu égratignée avec ce qui s'est passé le 29 août. Il y aura un travail de reconstruction au niveau de la confiance qu'on se doit, les uns, les autres, pour pouvoir tenter de trouver une solution viable pour la Nouvelle-Calédonie. Là, le 29 août, la confiance en a pris un coup.

Journaliste : Il reste que vous avez passé 16 mois à la tête du Congrès, vous avez été élu le 1er avril, votre élection a été cassée, vous avez été réélu le 19 août dernier. Pendant tout ce temps, vous avez mené un certain nombre d'actions, vous avez essayé de renouveler l'institution Congrès. De quoi est-ce que vous êtes le plus fier de tout ce que vous aviez fait au cours de cette année écoulée ?

Rock Wamytan : L'ensemble des textes que nous avons passés au niveau du Congrès, depuis l'année dernière, notamment les textes des transferts. Ça représente plus de 500 heures, on a fait le calcul, entre les 25 séances publiques dont nous avons tenues. Bon, n'en parlons pas du nombre de réunions des commissions. Le Congrès de la Nouvelle-Calédonie, sous ma candidature, a fait un travail vraiment exceptionnel. Nous avons mis en place, aussi, des dispositifs qui permettent que l'outil administratif du Congrès soit plus performant. Là, on a pratiquement terminé le travail à ce niveau-là. Sur la question de l'organisation proprement dite pour les élus, pour améliorer les conditions de travail des élus, il y a eu toute une série d'initiatives que j'ai prises aussi, notamment la mise en place d'un centre de documentation qui va fonctionner à peu près dans une quinzaine de jours. La venue de tous ces experts de Sciences Po Paris, tant pour les transferts sur le droit civil, droit commercial, que pour le diagnostic de l'économie calédonienne, ont permis aussi d'aider les élus à leur apporter un éclairage pour alimenter le débat démocratique au sein du Congrès de la Nouvelle-Calédonie. Bien sûr, toute la partie de la coopération interparlementaire, que j'ai vraiment développée, un de mes prédécesseurs, je crois que c'était Loueckhote, et ensuite, Martin, avait déjà signé un accord entre le parlement de Vanuatu et le Congrès de la Nouvelle-Calédonie. J'ai renoué un accord avec le parlement du Vanuatu l'année dernière, et j'ai commencé à explorer des possibilités de coopérations interparlementaires avec les pays mélanésiens et l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Donc, c'est à ce titre qu'on a visité l'Australie, avec une délégation du Congrès, le parlement de Papouasie Nouvelle-Guinée, des îles Salomon, on a été à Fiji, etc. Et, la Nouvelle-Zélande, on a eu une grande discussion avec le ministre des affaires étrangères lorsqu'il est passé dernièrement. Donc, c'est toute cette coopération. Et là, maintenant, nous sommes en train de faire rentrer tout doucement la Nouvelle-Calédonie dans le réseau des parlements, ils appellent ça le Pacific Parlementary Network, c'est-à-dire sur le réseau du parlement du Pacifique. C'est un réseau qui est en lien avec l'union interparlementaire de tous les parlements du monde, qui regroupe à peu près 162 parlements du monde entier, et ils ont mis en place ce réseau dans le Pacifique. Et d'ailleurs, suite à notre visite en Australie, au mois d'avril dernier, nous avons été habilités, le Congrès a été invité à participer à ce Pacific Parlementary Network à Apia, au début du mois de juillet. Contrairement à ce que disait monsieur Rigoureau, là, à la télé, la dernière fois, j'étais choqué quand il a dit que monsieur Wamytan s'est beaucoup promené dans le Pacifique. Alors celui-là, il raconte n'importe quoi parce qu'il ne sait même pas ce qu'on fait exactement. Il devrait quand même s'informer avant de raconter des bêtises pareilles, surtout un grand jour comme ça, puisqu'il y avait des milliers de Calédoniens qui écoutaient. Je ne me suis pas promené, j'ai fait un travail qui consiste à faire quoi ? À faire en sorte que la Nouvelle-Calédonie s'intègre de plus en plus et de mieux en mieux dans sa région naturelle.

Journaliste : Est-ce qu'il y a des choses que vous regrettez de ne pas avoir eu le temps de faire, que vous vouliez faire avant de quitter…, ou vous auriez fait si vous aviez été réélu président ?

Rock Wamytan : Là, je pense que j'ai posé les bases de la réorganisation, de l'administration, et tout, de cette coopération. Les grands enjeux de société, c'est en place, là haut, avec la commission de la vie chère, etc. Nous avons voté, dernièrement, la commission spéciale avec les organisations patronales représentatives, donc ça y est, c'est mis en place, ils vont commencer à se réunir prochainement. Moi, j'aurais bien voulu poursuivre, parce qu'un an et demi, c'est trop court et c'est là où je suis d'accord avec certains responsables politiques aussi qui disent qu'il faut peut-être revoir le mandat des présidents, parce qu'un an, c'est trop court. Si vraiment on souhaite donner au Congrès, redonner au Congrès cette dynamique et ramener le débat parlementaire au sein même de cette institution, qui est la première institution du territoire, du pays, le mandat d'un an est un peu court.

Journaliste : Le mettre sur l'ensemble de la mandature.

Rock Wamytan : Par exemple, mettre sur l'ensemble de la mandature, ou peut-être, une moitié, par exemple, deux ans, deux ans et demie, un truc comme ça. Mais au moins, un président, lorsqu'il prend ses fonctions, il a une raison qui est dégagée devant lui. Mais quand on a qu'un an à peine, et puis après, il faut encore discuter à droite, à gauche, pour voir s'il faut être réélu ou pas, c'est un peu compliqué, quand même. Là, j'ai quand même eu la chance d'avoir été président du Congrès pendant presque 18 mois. Là, j'ai quand même pu faire des choses. Nous avons pris un certain nombre d'initiatives, j'espère en tout cas, comme je suis vice-président maintenant, j'espère en tout cas qu'avec le nouveau président, monsieur Gérard Poadja, s'il accepte, parce que c'est lui maintenant qui préside, de poursuivre dans ce…

Journaliste : Vous avez quand même été élu premier vice-président du Congrès. Vous allez travailler ensemble maintenant, vous allez partager vos idées ou vous pensez que ce ne sera pas possible de travailler ensemble ?

Rock Wamytan : En tout cas, moi, ce que je souhaitais voir avec le nouveau président et puis son équipe, c'est de savoir dans quel état d'esprit ils sont. Ils ont pris le Congrès, c'est pour faire quoi ? Est-ce qu'ils ont pris le Congrès pour en faire un bastion de résistance contre le Rassemblement UMP, contre l'Avenir ensemble, et peut-être contre les indépendantistes, en attendant 2014, pour mieux sortir plus fort en 2014 ? Ou l'autre option qui est plus sage, pour moi, et plus payant à terme : est-ce qu'ils ont pris le Congrès d'abord pour se faire reconnaître dans le paysage politique, mais aussi pour terminer le travail de cette mandature sur un certain nombre de textes relatifs aux transferts de compétences et faire en sorte d'amener le débat au sein de ce Congrès, et non pas de la contestation permanente qui fatigue, à la longue, les uns et les autres ? Moi, c'est la question que je leur pose. J'aurai la réponse lundi, parce que lundi, on fait la passation. Lundi après-midi, je ferai la passation officielle et coutumière, entre monsieur Wamytan, ancien président, et monsieur Poadja, nouveau président, d'autant plus que nous sommes des Kanaks et que nous arrivons à ces responsabilités-là institutionnelles importantes, mais il faut que ça se passe aussi dans un cadre coutumier. Et tout ça sera fait devant le personnel du Congrès, lundi après-midi. Et dans la foulée, j'aurai les discussions avec eux pour avoir les réponses entre les deux questions que je vais leur poser, soit la première option, ou la deuxième option.

Journaliste : Rock Wamytan, merci d'avoir accepté notre invitation.

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